Et
dire que certains le considéraient comme un ministre responsable et d’autres
pensaient qu’on pourrait supprimer le communautarisme au Liban de notre vivant.
Double rire pour de telles naïvetés. La
réaction hystérique de Wael Abou Faour suite aux critiques, comment
dirais-je, acerbes (même pas), incisifs (euh, plutôt) ou crues (certainement), de Nadim Koteich à l’égard de Joumblatt & Fils est choquante. Elle est indigne d’un homme politique.
Dans l’émission DNA du 29 juillet, le journaliste libanais a osé commenter avec
l’ironie dont il est toujours capable, pendant deux minutes et demie svp (3:17-5:00 et 8:55-9:30), les
déclarations de Walid Joumblatt, annonçant « d’avoir
retiré sa main de toute action d’investissement dans le dossier des déchets »,
après avoir senti son danger pour lui sur le plan politique, et précisant que
l’association de ses deux fils, Teymour (33 ans) et Aslan (32 ans) avec Riyad
el-Assaad pour prendre part dans le partage du gâteau des déchets, n’est plus
de mise. Koteich évoquera « l’odeur
de corruption » qui se dégage de ce dossier qui fait fuir Joumblatt,
regrettera que l’actionnariat au Liban ne soit pas au service des citoyens
mais un partage financier entre les mains des politiques, rappellera cette
déclaration de Walid Bey datant de 1995 où il a avoué qu’il avait deux cahiers des
comptes, un qu’il présente à l’Etat et un autre pour lui, et enfin, affirmera
que les Libanais seraient d’accord avec un vieux souhait exprimé par le Beik où il
avait dit qu’il préférait être un éboueur à New York plutôt qu’un leader au pays du
Cèdre. C’est à peu près tout.
Bon, ce n’est pas très gentil mais avouez qu’il
n’y a rien de vraiment méchant. D’ailleurs, cet épisode de DNA était un grand coup de gueule, reflet des états de choc, d’écœurement et de déception dans lesquels se trouve toute la population libanaise depuis deux semaines, bien plus qu'une dissection de la crise des
déchets. En tout cas, il n’y avait rien qui
pouvait justifier qu’un ministre d’Etat de la République libanaise se déchaine avec une
violence verbale inouïe sur un journaliste qui n’a fait que son boulot. Nadim
Koteich ne révèle aucun secret puisqu’il se contente de commenter des
déclarations de la girouette de Moukhtara en y rajoutant quelques faits, le tout
saupoudré d'une bonne dose de sarcasme qui a fait tout le succès de son émission. Mais, c’en était trop pour le ministre druze. Le
jeune homme montera au créneau pour balancer
les pires insultes jamais proférées en publique, surtout à ce niveau, croyant avec un crétinisme indescriptible défendre
ses coreligionnaires et les intérêts de « Joumblatt & Fils ». Le bonhomme n’y
va pas de main morte avec les noms communs, les adjectifs et les synonymes les plus injurieux. Il
se surpasse en recourant à des mots et à des jeux de mots qui ne sont pas
courants dans la langue arabe, encore moins dans le parlé libanais. Dans son emportement hystérique, le pauvre ne s'est pas rendu compte, qu’indépendamment du style, quiconque aligne les insultes chaotiques, se rapproche davantage d'une racaille que du grand Moutanabbi.
Pour s’assurer que tout sera bien compris afin
de mesurer réellement combien Wael Abou Faour est tombé si bas, voici une
traduction en français. « En ces
temps méprisables, il arrive qu’un mercenaire,
acheté, inconstant et enragé, un fervent sympathisant de la
bassesse morale, un ignoble bâtard
politique tombé de la traite, qui exploite une tribune (Futur TV) que nous
respectons et qui se cache derrière un site que nous considérons (al-Modon), porte
atteinte à la stature (de Walid Joumblatt), qu’aucune plante de pieds ne
pourra fouler, espérant attirer l’attention, obtenir un prestige, gagner
l’approbation ou mendier quelques pièces argentées, ce qui a longtemps été le motif de cette errance entre les
convictions et les affiliations mensongères et de ce mercantilisme changeant et ambulant ». Waouh, enno khod nafass, wou 7otallak chi no2ta bel jémlé. La 7awla wala qowata ella bellah, 2al « ma3ali
elwazir » ! Walao, rou2 3a wad3ak ya bou fa3our, mets-toi
en position du lotus, inspire, expire et répète avec moi, « cool Raoul, relaxe Max, à l’aise Blaise » et rebelote, « cool Raoul, relaxe Max, à l’aise Blaise » et rebelote, « cool Raoul, relaxe Max, à l’aise Blaise ». Hallucinant. Zappons
cette redondance linguistique qui est d’une lourdeur à filer la migraine à plus
378 millions d’Arabes du Machreq au Maghreb. Non mais, il a fumé la moquette de
son ministère ou quoi ? Le plus comique et ironique dans cette histoire c’est
que quiconque prend connaissance du délire de Wael Abou Faour, sans savoir qui
en était l’objet, pensera à Walid
Joumblatt en premier.
Certes, Nadim Koteich est loin d’être irréprochable.
Personne ne l’est. D’ailleurs, je ne le suis pas. Il a déjà dérapé plus d’une
fois. J’en ai parlé dernièrement, à l’occasion du meurtre d’Achrafieh. Il peut m'arriver de déraper aussi. Personne n'est parfait. Ceci
dit, dans l’affaire présente, on ne peut absolument rien lui reprocher. Les
faits sont accablants pour le ministre de la Santé. Nadim Koteich a porté une info, compromettante bien entendu, à la connaissance du plus
grand nombre de Libanais. Disons qu'il a tout simplement fait son boulot. C’est là où réside son erreur aux yeux du défenseur zélé
de la girouette de Moukhtara, et c’est bien cela qui a poussé Wael Abou Faour à
décompenser. L’info a permis aux Libanais de réaliser à quel point le
pourrissement de la situation au Liban se conjuguait à tous les niveaux. Pendant
que le peuple libanais se débat pour sortir du pétrin de l’une des crises
sanitaires les plus graves de son histoire, celle des ordures, Joumblatt
& Fils tentaient deux choses : mettre les « régions
druzes » à l’abri des ordures des Beyrouthins et des Mont-Libanais, vive
le « partenariat national »
avec lequel le leader druze bassine les Libanais depuis 38 ans, et prendre une part du gâteau des déchets,
« les affaires sont les
affaires », comme l’a bien résumé Octave Mirbeau dans sa comédie il y a plus d'un siècle.
A ce propos, c’est sans doute l'occasion de vous repasser une autre déclaration gravissime
de Walid Joumblatt, qui est passée
inaperçue car les politiques et les médias libanais, tiennent toujours compte de cette énigmatique notion de « el-khousousiyé el-derziyé »,
la spécificité druze, de sorte à autoriser au Beik ce qui n'est pas permis aux autres. D’après le quotidien al-Akhbar du 30 juillet, le leader druze a fait savoir qu’il se chargerait bien
des ordures des Musulmans (de Beyrouth et du Mont-Liban), à condition que les Chrétiens s’occupent
de ceux du Metn et du Kesrouan, les deux plus grandes régions chrétiennes
du Liban. A la suite de quoi, il a beau tweeté comme un ado, multipliant les
blagues à la mords-moi-le-nœud et les émoticônes oiseuses pour que le ballon d'essai passe sans provoquer trop de turbulences, il n'empêche que ses propos restent d'une étroitesse
d'esprit affligeante. Il ne se rend pas compte lui aussi que selon cette logique communautaire stupide, reprise par d’autres
hommes politiques, les régions druzes ou mixtes (et ce ne sont pas "ses" régions soit dit au passage !), auraient à revenir à la bougie,
l'usine électrique de Zouk ne devrait plus assurer que l'alimentation du
Metn et du Kesrouan justement, les régions qu’elle pollue le plus. Ça aurait été Michel Aoun qui aurait eu la logique de la distribution communautaire des ordures, Walid Joumblatt
l’aurait crucifié.
Wael Abou Faour a
déçu beaucoup de monde. Ce n’est pas la première fois. Il a tenté en automne dernier, de se forger la stature de l’homme incorruptible à travers des campagnes de
contrôle des établissements alimentaires. Celles-ci se sont transformées
progressivement en de ridicules shows télévisés d’auto-promotion du Parti socialiste progressiste (parti à dominante druze)
-et de son chef, Walid Joumblatt- que j’ai dénoncés dans deux articles au mois
de novembre 2014. Toujours est-il que si
un homme politique comme Wael Abou Faour, le ministre de la Santé, est incapable de supporter des critiques crues, de contrôler
ses nerfs et de maitriser ses réactions publiques, et se livre à de
verbiages disproportionnés, à la fois instinctifs, impulsifs et agressifs, dans le but de défendre
ses coreligionnaires et ses amis politiques, que peut-on s’attendre des masses populaires ? Comment s’étonner encore de la violence
physique des Tariq Yatim, assassin de Georges el-Rif, et des Hicham Daou, meurtrier de Rabih Kahil, quand un ministre met autant d’agressivité
dans un texte de quelques lignes, parce qu'un journaliste politique de l'école satirique comme Nadim Koteich a critiqué trois de ses coreligionnaires, et se croit au-dessus des lois, alors qu'il est censé représenter l'Etat libanais ? Pourquoi s’étonner toujours de la passivité des témoins du meurtre d’Achrafieh
lorsqu’un journaliste est lynché et calomnié par un ministre d'Etat et qu’on ne trouve
personne du monde politique et médiatique pour le défendre en public et non en coulisse ? Tous les
médias ont rapporté l’affaire, AUCUN n'a condamné fermement les propos abjects de Wael Abou Faour. C’est quand même extraordinaire !
Dans
un pays normal, « Monsieur Propre » aurait démissionné de sa propre initiative ou
il aurait été poussé à le faire sous la pression populaire. Dans le pire des
cas, le Président de la République et le Premier ministre lui auraient tiré les
oreilles.
Mais, le Liban n’est pas un pays normal, tâchons de s’en souvenir. Terminons
sur une note humoristique, concernant la
dernière réplique du journaliste au ministre, elle est est exquise. « Ce qui m’a attiré l’attention, c’est le fait que l’honorable
ministre a fourni un effort qui mérite d’être signalé. Très peu de gens l’ont dépassé
dans cette aptitude à dire le maximum de propos injurieux en un minimum de
mots. De ce fait, il est digne d’obtenir de son autorité de référence le grade
d’Oscar en politique, et un Oscar de la morale, ainsi qu'un Oscar du mérite et du
lieu. » Indice pour apprécier pleinement le sarcasme de la réponse, un des chiens des
Joumblatt porte le nom d’Oscar.
Ah, encore deux points de vue sur cette affaire, à la fois sur le fond et sur la forme. Si on effectue une analyse de texte du défilé d’injures dont le ministre de la Santé nous a gratifiés il y a deux jours, à la déception s'ajoutera la répulsion. D’après le Larousse, un « mercenaire » est « une personne qui ne travaille que pour de l'argent à une mission accomplie ordinairement par conviction ». Tiens, tiens, un mot qui devrait faire tilt dans votre tête. « Acheté », « bâtard » et « traite » doivent vous indiquer que vous êtes sur la bonne piste. Ils signifient respectivement, « obtenu par corruption » pour le premier terme, « enfant conçu en dehors du mariage ou un animal qui n’est pas de pure race » pour le second, et « trafic d'êtres humains effectué en vue d'une vente ou d'un commerce de prostitution ». Très instructif. La confirmation de vos soupçons est obtenue avec « mendier », « convictions et affiliations mensongères » et « mercantilisme », en somme, tout tournerait uniquement autour de l’argent chez Nadim Koteich. Sacré Wael Abou Faour ! Tout ce style tarabiscoté est pour sous-entendre que Nadim Koteich, qui est de confession chiite, ne devrait pas selon les « normes » de Joumblatt & Co, travailler pour la chaine qui appartient au Courant du Futur, parti multiconfessionnel à dominante sunnite, mais se rallier aux partis de « sa confession », le Hezbollah (Hassan Nasrallah) ou Amal (Nabih Berri) par exemple. Mais voyons, il devrait suivre ton exemple et défendre ses coreligionnaires contre vents et marrées ? Eh bien, il faut croire qu’Oscar est plus qu’un nom et une récompense, c’est un destin et tout le monde n'a pas la carrure pour cela. Je n’ai jamais pensé qu’un homme peut se montrer aussi bas, infâme et aveuglé. Deux mots sur la forme. Il clair que Wael Abou Faour a mis autant d’agressivité dans ces propos dans le but de dissuader quiconque, Nadim Koteich en premier, de s’attaquer à l'avenir aux affaires de « Joumblatt & Fils ».
Ah, encore deux points de vue sur cette affaire, à la fois sur le fond et sur la forme. Si on effectue une analyse de texte du défilé d’injures dont le ministre de la Santé nous a gratifiés il y a deux jours, à la déception s'ajoutera la répulsion. D’après le Larousse, un « mercenaire » est « une personne qui ne travaille que pour de l'argent à une mission accomplie ordinairement par conviction ». Tiens, tiens, un mot qui devrait faire tilt dans votre tête. « Acheté », « bâtard » et « traite » doivent vous indiquer que vous êtes sur la bonne piste. Ils signifient respectivement, « obtenu par corruption » pour le premier terme, « enfant conçu en dehors du mariage ou un animal qui n’est pas de pure race » pour le second, et « trafic d'êtres humains effectué en vue d'une vente ou d'un commerce de prostitution ». Très instructif. La confirmation de vos soupçons est obtenue avec « mendier », « convictions et affiliations mensongères » et « mercantilisme », en somme, tout tournerait uniquement autour de l’argent chez Nadim Koteich. Sacré Wael Abou Faour ! Tout ce style tarabiscoté est pour sous-entendre que Nadim Koteich, qui est de confession chiite, ne devrait pas selon les « normes » de Joumblatt & Co, travailler pour la chaine qui appartient au Courant du Futur, parti multiconfessionnel à dominante sunnite, mais se rallier aux partis de « sa confession », le Hezbollah (Hassan Nasrallah) ou Amal (Nabih Berri) par exemple. Mais voyons, il devrait suivre ton exemple et défendre ses coreligionnaires contre vents et marrées ? Eh bien, il faut croire qu’Oscar est plus qu’un nom et une récompense, c’est un destin et tout le monde n'a pas la carrure pour cela. Je n’ai jamais pensé qu’un homme peut se montrer aussi bas, infâme et aveuglé. Deux mots sur la forme. Il clair que Wael Abou Faour a mis autant d’agressivité dans ces propos dans le but de dissuader quiconque, Nadim Koteich en premier, de s’attaquer à l'avenir aux affaires de « Joumblatt & Fils ».
Laissons les Joumblatt à François Hollande, puisque le président français est si ravi par le père et le fils, qu'il réclame lui-même de les voir. Hélas,
le niveau général dans notre Liban est
bas. Et il s’enfonce de jour en jour. Pendant qu’une frange de Libanais
tente tant bien que mal à l’élever, d’autres s’acharnent à l’abaisser
davantage. Morale de l’histoire, que l’on soit politique, journaliste, blogueur,
militant ou sympathisant, au pays du Cèdre ou ailleurs sur cette planète, avant de
discourir, d’écrire et d’agir, il vaut mieux se relire, s’instruire et
réfléchir. Sinon, il est préférable de s'abstenir de polluer son environnement. Par les temps qui courent, c'est bien plus qu'une métaphore !