vendredi 8 août 2014

Contrôle de la frontière syro-libanaise et création de camps de réfugiés en territoire syrien, sinon, à la prochaine ! (Art.240)


Le 2 août 2014, les pillards de la Révolution syrienne décident de s’en prendre à l’armée libanaise et aux Forces de sécurité intérieure suite à l’arrestation au Liban d’un djihadiste syrien du Front al-Nosra et de l'Etat islamique. Le 28 mai 2014, des ressortissants syriens de Syrie et des réfugiés syriens au Liban se ruent à l’ambassade syrienne pour reconduire le dernier tyran des Assad. Le 23 août 2013, les Eid organisent un double attentat à la sortie d’une mosquée de Tripoli et se réfugient en Syrie. Le 28 mai 2013, les occupants d’un Hummer venant de Syrie abattent trois soldats libanais dans la Bekaa et repartent en direction de la Syrie sans la moindre inquiétude. Le 16 mars 2013, le porte-parole de l’Armée syrienne libre déclare que les rebelles syriens seraient prêts à se retirer du Liban si l’armée libanaise assurait le contrôle de la frontière avec la Syrie. Le 1er février 2013, l’arrestation d’un suspect libanais anti-régime syrien par les autorités libanaises dégénère en un affrontement entre une unité des renseignements de l'armée libanaise et un groupe armé libanais de la région de Ersal. Le 9 août 2012, Michel Samaha est arrêté en possession de 24 charges explosives fournies par le chef de la sécurité nationale syrienne, en vue de concocter des attentats terroristes à caractère confessionnel et djihadiste dans le Nord du Liban à la demande personnel de Bachar el-Assad. Et depuis le début du conflit syrien, le Hezbollah enterre ses miliciens tués en Syrie en mentionnant expressément qu’ils sont morts dans l’accomplissement de leur devoir djihadiste, les ressortissants syriens affluent en masse au Liban et plusieurs attentats ensanglanté régulièrement diverses régions libanaises. Bonjour le contrôle de la frontière syro-libanaise !

Tous ces incidents, qui ont impliqué des ressortissants Syriens et Libanais de tout bord, des partisans et des opposants de Bachar el-Assad, renvoient tous à ce qui se passe en Syrie. Ils prouvent que l’État libanais n’exerce pas sa souveraineté au niveau de la frontière syro-libanaise. De ce fait, celle-ci n’est plus qu’une passoire depuis un long moment. Depuis l'Indépendance même, autant la première que la seconde. En tout cas, des djihadistes syriens sont bel et bien infiltrés dans les rangs des réfugiés syriens. Ils n’hésitent pas à défier l’État libanais et attaquer ses institutions. La question qui se pose est donc de savoir que peut-on bien faire pour éviter la suite logique de ces tragédies ?

Le 14 Mars, le courant du Futur comme les partis des Kataeb et des Forces libanaises, affirme que l’intervention de la milice chiite aux côtés du régime alaouite, est directement responsable de l’arrivée des djihadistes au Liban. Il sous-entend que le retrait des miliciens libanais de Syrie, éloignera les djihadistes syriens du Liban. Il échappe au camp souverainiste que le « Levant » de l’ancienne dénomination de l’État islamique (État islamique en Irak et au Levant), comprend le Liban. Le 8 Mars, Michel Aoun en tête, prétend qu’il n’en est rien, les terroristes syriens seraient venus avec ou sans l’implication du Hezbollah en Syrie, motivés par le caractère islamiste de leur mouvement et l’expansionnisme djihadiste qui les anime. Même si ceci n’est pas complètement faux, il ne peut échapper au chef du Courant patriotique libre, que cette double motivation est partagée par son allié avec qui il s’est pacsé il y a plus de huit ans.

Quoi qu’il en soit, trois choses sont sûres et certaines, n’en déplaise aux deux camps : 

1. En intervenant en Syrie, depuis plus de deux ans, les miliciens chiites libanais (Hezbollah) ont donné une « raison supplémentaire » aux djihadistes sunnites syriens (Nosra/État islamique) d’agir au Liban. Leur retrait de Syrie, ôtera donc cette raison, c’est aussi simple que cela.

2. En annonçant la présence de rebelles syriens à Ersal, par Louay al-Moukdad lui-même, il y a un an et demi, et étant donné le grossissement incontrôlé du nombre de ressortissants syriens au Liban -je rappelle que les réfugiés, les déplacés, les rebelles, les djihadistes, les chabiha, les moukhabarat ou les diplomates, comme tous les ressortissants syriens, peuvent rentrer librement au pays du Cèdre- l’attaque odieuse du 2 août était donc parfaitement prévisible

3. Ni le régime syrien de Bachar el-Assad, malgré l’aide apportée par les miliciens chiites du Hezbollah, ni les rebelles syriens, malgré la contribution des djihadistes de tout poil, ne sera en mesure de l’emporter à court ou à moyen terme. La guerre civile syrienne sera encore très longue et la solution est plus que jamais politique. Gare au 8 Mars et au 14 Mars de commettre la double erreur du printemps 2011, celle qui a consisté à croire chaque semaine, pendant les deux années suivantes, que tout allait se régler dans un sens ou dans un autre, mardi ou vendredi prochain.

Qui ne veut pas reconnaitre ces trois certitudes, n’a qu’à foutre sa tête d’autruche dans le premier bac à sable qu’il trouve.

L’attaque des djihadistes au Liban est inadmissible. Il n’empêche que l’exagération du phénomène de « l’État islamique » par les médias libanais pro-régime syrien est suspecte. Elle n’est là que pour justifier et couvrir l’enlisement de la milice du Hezbollah dans la guerre civile syrienne, aux côtés du régime alaouite de Bachar el-Assad, contre les rebelles sunnites. Nul besoin de disserter sur le fait que l’armée libanaise viendra rapidement à bout du soulèvement des djihadistes syriens à Ersal, comme elle l’a déjà fait au prix d’un grand sacrifice en 2007 contre les islamistes de Fateh el-islam à Naher el-bared, malgré la « ligne rouge » fixée par Hassan Nasrallah pour empêcher son intervention, et en un claquement de doigts contre la bande à Assir dans la région de Saïda en 2013, avec la participation active du Hezbollah. Sa force de frappe, le feu vert du gouvernement libanais et le soutien politique et populaire des Libanais toutes tendances politiques et appartenances communautaires confondues, ne laissent de la place à aucun doute. Mais, ce qui était prévisible dans le passé, l'est aujourd'hui pour l’avenir, si aucun des paramètres principaux qui ont mené à l’attaque du 2 aout, et aux autres incidents relevés au début de l’article, ne change pas. L’attaque du 2 août se répètera vraisemblablement sous la même forme ou sous une autre forme. La situation s’envenimera. Il y aura des actions d'une plus grande ampleur et d’une meilleure efficacité. On ne les évitera certainement pas en laissant les miliciens « chiites » du Hezbollah aller combattre les rebelles et les djihadistes « sunnites » en Syrie, alors que le conflit syrien est encore long et en dépit de tout bon sens stratégique, politique et militaire. Enno ma3lé !

Comme je l’ai exprimé à chaud, pour contrer les attaques djihadistes au Liban, il y a deux actions concrètes : le contrôle hermétique par l’armée libanaise de la frontière syro-libanaise, dans les deux sens, cela va de soi, et la création de camps de réfugiés en territoire syrien. La première action est aisée à mettre en œuvre et dépend entièrement des Libanais. On aurait dû la faire dès le 26 avril 2005 à minuit. La deuxième est complexe et dépend des pressions internationales sur le régime syrien. On aurait dû y travailler pour la concrétiser, depuis l’afflux massif des réfugiés syriens au Liban à l’été 2012. Le 14 Mars -le chef du Futur, Saad Hariri, ainsi que les leaders chrétiens, Samir Geagea et Amine Gemayel- est sans aucune ambiguïté pour la 1re action, qu’il réclame depuis plusieurs années. Il l’a fait savoir de nouveau il y a quelques jours lors de la réunion de toutes ses composantes. Par contre, il ne s’est pas prononcé pour la 2e action. De l’autre côté, le 8 Mars, dans toutes ses composantes -de Hassan Nasrallah au leader chrétien Michel Aoun- est contre la 1re action, sans aucune ambiguïté. Il l’a fait encore savoir récemment. En plus, il ne veut surtout pas débattre de la 2e action, pour la bonne raison que son allié à Damas, Bachar el Assad, a exprimé à maintes reprises sa vive opposition à cette option.

Ainsi, afin d'éviter que le drame du 2 août ne se répète à l'avenir, il revient au 14 Mars de se prononcer sur la création de camp de réfugiés en territoire syrien, et non « en territoire libanais », en mettant la communauté internationale, mais aussi les rebelles syriens devant leurs responsabilités. Au 8 Mars d'accepter le déploiement immédiat de l'armée libanaise le long de la frontière syro-libanaise, pour assurer un contrôle hermétique de cette passoire dans les deux sens. S’il faut « négocier » avec le régime syrien, comme l’a suggéré Michel Aoun il y a quelques jours, le 8 Mars devrait commencer par convaincre son allié Bachar el-Assad d'accepter la création de camps de réfugiés en territoire syrien

L'arrivée inattendue de Saad Hariri, le chef du 14 Mars, à Beyrouth aujourd'hui même, offre une occasion en or aux leaders libanais pour mettre un terme à la politique de rafistolage qui règne dans notre pays et dans tous les domaines -de la vacance présidentielle au contrôle des frontières- à condition que tout le monde soit sincère. Sinon, en route vers le pire et à la prochaine !


Post-scriptum 1
Il faut attirer l'attention des lecteurs qui n'avaient pas de réseau durant les trois dernières années, que le 8 Mars s’est retrouvé seul au pouvoir bien avant le début du conflit syrien en mars 2011. C’est donc durant le règne du 8 Mars que nous avons connu l'émergence des graves problèmes auxquels nous devons faire face actuellement: le phénomène djihadiste en Syrie et au Liban, l'implication du Hezbollah dans la guerre civile syrienne et l'afflux de réfugiés syriens au Liban. À ce stade, étant donné la gravité de la situation au Liban, au moment où l'armée libanaise est encore engagée dans les combats contre les terroristes d'al-Nosra / État islamique, il faut sans doute et dans l'intérêt du Liban, agir avec efficacité plutôt que de palabrer sur le passé : combattre les djihadistes au Liban, déployer l'armée libanaise aux frontières, fermer la frontière syro-libanaise dans les deux sens, créer des camps de réfugiés en territoire syrien et expulser les réfugiés-djihadistes et les réfugiés-chabiha actuellement au Liban vers la Syrie.

Post-scriptum 2
La frontière syro-libanaise fait 375 km, ce qui n’est pas une mince affaire à contrôler. Mais, l’armée libanaise y arrivera puisqu’elle peut compter sur 130 000 actifs à ce qu’il parait et 280 000 réservistes. Son budget est de près de 2 milliards de dollars par an. Elle a un bon d’achat de 3 milliards de dollars d’armement français de la part de l’Arabie saoudite (en suspens à cause de certains intermédiaires qui auraient réclamé 500 millions de dollars de commission !), dont un milliard de dollars à usage immédiat. Elle a zéro dollar de la part de la République islamique d’Iran, qui préfère financer la milice du Hezbollah, qui a fait allégeance au wali el-fakih, le Guide suprême, Ali Khameneï. Les 25 000 hommes des Forces de sécurité intérieure pourront être mis à contribution. On peut se faire aider aussi par les contingents de la FINUL, jusqu’à 15 000 hommes comme le prévoit la résolution 1701, en demandant au Conseil de sécurité de modifier les règles d’engagement de la Force intérimaire des Nations unies au Liban.

Post-scriptum 3
Qui tient à se rendre en Syrie dans les circonstances actuelles, n'a qu'à prendre un vol direct pour Damas, ou à défaut, il n'a qu'à transiter par Istanbul ou Téhéran, selon affinité, pour y passer quelques jours de vacances avant de s'engager à mort dans les combats. Khalli el chabibé terte7 wou traïyi7 ! L'avenir de la région dépend avant tout des peuples de la région et non de Barack Obama, de Vladimir Poutine ou de Bakhos Baalbaki. Contrairement à ce qu’elles pensent, les autruches de toute plume devraient savoir que les djihadistes de tout poil disparaitront quand il y aura des régimes démocratiques, souverainistes et forts à Téhéran, à Bagdad, à Damas et à Beyrouth. Les situations contraires, des régimes dictatoriaux, vassaux et faibles au Moyen-Orient, comme c'est le cas actuellement, ne feront que les renforcer.