C’est devenu un art de gouverner à la libanaise !
Après le Premier ministre, Nagib Mikati, voilà un nouvel adepte, Wael Abou Faour,
le ministre libanais des Affaires sociales, un proche du leader druze Walid
Joumblatt. Il vient d’accorder une interview au quotidien Acharq el-Awsat, qui
a été publiée aujourd’hui même. Sa lecture est fascinante. On découvre un jeune ministre qui explique en long et en large les dangers qui nous guettent
et qui au lieu de s’atteler à les écarter, se perd dans les diversions
politiques à 5 piastres. A le lire, on dirait que c’est un touriste qui a profité des offres
promotionnelles de l’hiver, il n'est que de passage au pays du Cèdre.
Sa
gestion du dossier des réfugiés syriens au Liban est calamiteuse. Aujourd'hui, 25% des habitants du Liban sont des réfugiés et le ministre des Affaires
sociales palabre. Il s’est montré incompétent non seulement pour prévoir cette
situation, qu'il a sous-estimée, il le reconnait, mais surtout pour gérer l’afflux massif de ces réfugiés. Le Liban n’a
reçu que quelques millions de dollars pour 1 million de réfugiés, soit quelques
misérables dollars par réfugié et le ministre palabre pour Acharq el-Awsat. Au
lieu de ne plus dormir la nuit et aller sillonner sans relâche les capitales arabes et occidentales, pour mobiliser les
fonds nécessaires pour une gestion à long terme, très long terme même -car c'est loin de se
terminer !- il se contente de nous prévenir que « le dossier des
réfugiés est une bombe à retardement sur les plans financier, sécuritaire
et social » et attend gentiment dans son ministère les virements des gouvernements
arabes et occidentaux. Il nous prévient -il
aurait dû le prévoir depuis la militarisation du conflit syrien il y a plus d’un an et
demi- que nous pourrons accueillir 700 000 réfugiés de plus d’ici la fin
de l’année. Donc, plus de la moitié des habitants du Liban pourraient être des
réfugiés syriens à la fin de l’année 2013 mais le ministre de Walid
Joumblatt est totalement opposé à la fermeture des frontières pour des raisons « fraternelles
et humanitaires ». Il précise à un moment que « le retard dans l’adoption par l’Etat d'un plan d'action a conduit à cette réalité difficile » -comme nous sommes rassurés de l'apprendre!- mais se perd
par la suite à nous expliquer « qu’il existe des forces politiques (au
Liban) qui veulent fermer les frontières... historiquement, certains détestent
tout ce qui arabe ». On croit rêver ! Si vous avez raté le début, sachez que ce sont les propos d'un ministre, supposé responsable, de votre pays. Mais bordel, c’est qui l’Etat
en ce moment ? Bakhos Baalbaki et Malék el-tawouk ? Wael Bou Faour doit
tout simplement présenter sans plus tarder sa démission, pour incompétence, légèreté politique et
mise en danger du Liban.
Par ailleurs, dans cette interview le ministre de
Walid Joumblatt cherche à :
1. Faire oublier que le Bek est resté en bon terme
avec le « régime criminel », comme il dit, après la pause
anti-syrienne entre 2005-2008, et bien après le déclenchement de la Révolution
syrienne il y a tout juste 2 ans, jusqu’à ce que le compteur des morts soit passé à 5
chiffres, car il croyait, comme tous les pro-syriens, que le régime de Bachar
el-Assad avait la capacité d’écraser la Révolution syrienne.
2. Faire diversion après l’opposition honteuse du
Bek à une loi électorale juste, qui corrige la tare de la représentativité des
communautés chrétiennes au Parlement libanais. Tout le monde sait que le
principal opposant à une loi électorale juste au Liban est Walid Joumblatt car tout
ajustement de la représentativité des électeurs libanais ramènerait le poids électoral
du Bek à sa juste valeur. Le ministre du Parti socialiste progressiste veut faire oublier que la
girouette de Moukhtara voudrait maintenir la loi 1960, qui lui donne un
surpoids électoral en lui permettant de
désigner les députés chrétiens dans les cazas du Chouf, Baabda et Aley, ou au
moins de peser sur leurs élections.
3. Diluer son approche phobique dans des
considérations politiques. Le ministre de Walid Joumblatt craint que « la
position des Forces libanaises et du Courant patriotique libre sur la loi
orthodoxe, ne soit pas d’ordre électoral mais d’ordre politique sur la base d’une
volonté de se séparer du reste des composantes de la société libanaise... Et si
nous revenons aux expériences historiques, nous n’excluons pas cela ». Et
voilà, on revient à la vieille haine de Walid Joumblatt notamment à l'égard des partis qui représentent les communautés chrétiennes, qui sont
traitées régulièrement depuis 35 ans, par cet esprit féodal et communautaire, d’être
« isolationnistes ». Sans remonter à Mathusalem, tout le monde se
souvient très bien des propos « racistes » tenus par le Bek la veille
des élections de juin 2009, traitant les leaders chrétiens d’être ces « mauvaises
graines » qui ne changent jamais.
4. Le ministre du Bek laisse entendre que le Courant
du Futur est très amer après l’adoption par les Forces libanaises de la « loi
orthodoxe ». Propos de Wael Abou Faour, le roi de la diversion ! Le pauvre, il
tente de nous faire oublier que Walid Joumblatt a trahi magistralement le 14
Mars et a poignardé sans scrupules Saad Hariri dans le dos. Le ministre du Bek
pense que « que les Forces libanaises ont détruit l’esprit du 14 Mars qui
se base sur le partenariat islamo-chrétien ». Lol, quel culot ! Comme
s’il pouvait ignorer que le Bek s’est retiré du 14 Mars dès le 2 août 2009 pour
des raisons communautaires, la fameuse « spécificité de la communauté druze », ne supportant plus le rapprochement entre le
Courant du Futur et les Forces libanaises, et l’entente cordiale entre Saad
Hariri et Samir Geagea ! Le malheureux Wael Abou Faour tente désespérément de
faire oublier au peuple libanais que Walid Joumblatt restera, pour les Libanais et pour l'histoire, celui qui a permis
au Hezbollah de réussir son coup d’Etat démocratico-milicien le 12 janvier 2011,
pour des raisons opportunistes. Hélas, le jeune ministre a raté une belle occasion de se taire, au moins sur ce point !
Réf.