Alors que j'étais là, à me morfondre devant les nouvelles insipides
de la presse libanaise en écoutant Serge Gainsbourg à la terrasse du
coin, enivré par l'odeur de l'anis du verre de pastis qui trônait devant
moi en mémoire du Bachir, je me suis demandé qu'est ce qui pouvait bien lier Bachir Gemayel et Rafic Hariri ? Question tabou diraient certains!
Et
bien pas pour moi. Et il ne m'a pas fallu longtemps, le pastis aidant,
pour découvrir que beaucoup de choses liaient ces 2 hommes bien plus que
l'attitude pleine de panache et le pouvoir charismatique indéniable dont ils jouissaient. D'abord, il y a cette énorme capacité à rassembler au-delà de leur communauté et la fulgurante ascension au sommet de l'Etat. Ensuite, il y a l'amour immodéré de leur patrie: 10452 km2 et Lubnan awalan, 2 slogans pour un même combat ! Enfin, comment oublier que les 2 hommes ont été martyrisés par la dynastie tyrannique des Assad,
l'un par le père et l'autre par le fils! Et ce n'est pas tout, le
destin de ces 2 personnalités libanaises fut scellé un 14 du mois, l'un
en septembre, le jour de la Sainte Croix, l'autre en février à la Saint
Valentin!
Que ça plaise ou non, Bachir Gemayel et Rafic
Hariri sont les grands martyrs respectifs de leur communauté, chrétienne
pr le 1er et sunnite pr le 2e! Si les criminels n'avaient pas décidé
d'abréger leur séjour parmi nous, étant donné qu'ils étaient de la même
génération (1947/1944), non seulement ils se seraient rencontrés mais
ils se seraient entendus probablement. Je dirai même plus, ils auraient gouverné ensemble, réformé ensemble et reconstruit ensemble.
De
tout ce qui précède, je ressens une grande envie de réunir ces 2 hommes
-ils le sont déjà au fond de moi- sous une forme plus symbolique, une
sorte de réunion post-mortem virtuelle. Je trouve qu'il est temps de
donner des signes forts aux libanais, que l'alliance au sein du 14 Mars,
n'est ni temporaire, ni timide, ni superficielle, ni de circonstance.
Il est temps de sortir de ce conservatisme communautaire prudent, quitte à bousculer les sentiments de nos compatriotes.
Pour se faire, et si le 14 février prochaine, Samir Geagea, le frère spirituel de Bachir, se rendait sur la tombe de Rafic Hariri. Ce geste permettrait de gagner davantage le cœur de la communauté sunnite.
Et si le 14 septembre prochaine, Saad Hariri, l'héritier politique de Rafic, se rendait sur la tombe de Bachir Gemayel. Ce geste permettrait de gagner davantage le cœur de la communauté chrétienne.
Il
appartiendrait alors au 14 Mars, encore un destin naît le 14 du mois,
d'œuvrer à l'accomplissement de ce souhait. C'est une graine que nous
pouvons planter aujourd'hui, en espérant qu'elle germera au cours de
l'année 2012, au 7e anniversaire de la disparition de Rafic Hariri et au
30e de celle de Bachir Gemayel. Enfin, à nos grands leaders du 14 Mars -Samir
Geagea, Saad Hariri, Amine Gemayel, Dory Chamoun, Fouad Siniora, Farès
Souaid, Carlos Eddé, Ahmad Fatfat, Samy Gemayel et tous les autres- je
dirai : n'oubliez pas que les actions symboliques en disent long
pour les gens, bien plus que certains discours prononcés la veille des
élections !
Post-Scriptum
1. Voilà pourquoi je considère que le
Tribunal Spécial pour le Liban, qui poursuit actuellement les assassins
de notre ex-Premier ministre, jugera aussi l'esprit criminel des Assad
qui a hanté nos demeures pendant longtemps et qui a tué entre
autres notre ex-Président, mais aussi Hassan Khaled, René Mouawad, Ramzi
Irani et tant d'autres. Le TSL mettra donc un terme à l'insupportable
impunité qui régnait au Liban depuis l'assassinat de Kamal Joumblatt en
1977! Au passage, un grand MERCI au 14 Mars... On
oublie un peu vite que le TSL est l'oeuvre du 14 Mars et que le 8 Mars,
notamment le Hezbollah, Michel Aoun et Jamil El-Sayyed & Co, font
tout leur possible depuis le 14 février 2005 à 12h56, pour égarer
l'enquête et dynamiter ce tribunal !
2. Personne n'empêche Hassan Nasrallah de sortir de sa cachette pour aller déposer une gerbe sur la tombe de Bachir Gemayel !
Hélas, je ne pourrai pas l'inviter à se rendre sur celle de Rafic
Hariri, alors que son parti, bien que présumé innocent, est accusé par
le TSL de l'avoir assassiné, au risque qu'il soit hué et insulté par une
foule qui même si elle n'est sûre de rien pour l'instant, elle n'en
pensera pas moins: "wlak atal el atil w méché b jnézto"!