À l’issue de la réunion de son bloc le 29 août, Michel Aoun a affirmé que « le courant du Futur et un autre courant ont aidé à priver le Liban d’électricité durant une vingtaine d’années (...). S’ils veulent de l’électricité, qu’ils approuvent le plan qui a été exposé scientifiquement et qui ne présente aucun défaut ».
Voyons ce qu’il en est d’un peu plus près.
1. Le courant du Futur a aidé à priver le Liban d’électricité durant une vingtaine d’années.
Voici la liste des ministres qui se sont succédés à ce poste depuis la fin de la guerre civile :
1990-1992 : Mohammad Youssef Beydoun (proche de Hoss)
1992 : Mohammad Abdel-Hamid Beydoun (Amal)
1992-1993 : Georges Frem (indépendant)
1993-1998 : Élie Hobeika (parti Waad)
1998-2000 : Sleimane Traboulsi (proche de Hoss)
2000-2003 : Mohammad Abdel-Hamid Beydoun (Amal)
2003-2004 : Ayoub Hmayed (Amal)
2004-2005 : Maurice Sehnaoui (père de Nicolas Sehnaoui)
2005 : Bassam Yammine (Frangié)
2005-2008 : Mohammad Fneich (Hezbollah)
2008-2009 : Alain Tabourian (Aoun)
À partir de 2009 : Gebran Bassil (Aoun).
Aucun ministre « haririen » ! À part le court passage de Georges Frem, tous les ministres qui se sont succédés de 1990 à 2011 sont issus de partis qu’on peut désigner aujourd’hui par le camp du 8 Mars, pro-8 Mars ou anti-14 Mars. Aoun et le Hezbollah sont à ce ministère depuis plus de six ans.
2. Le plan n'a aucun défaut
Où donc ailleurs qu’au Liban paie-t-on 170$/mois pour 10 misérables ampères ? Alors question : pourquoi les ministres 8-marsiens n’ont-ils rien fait depuis vingt ans et se réveillent-ils seulement aujourd’hui? Bon, oublions le passé. Je me suis procuré le « Plan stratégique national pour le secteur de l’électricité » présenté par Gebran Bassil. J’ai choisi de me concentrer sur un point qui n’a pas été abordé et qui représente pour moi le véritable talon d’Achille de ce plan. En 39 pages de chiffres et de lettres, d’annexes et de nombreux tableaux, le ministre de l’Énergie et de l’Eau n’a pas réussi à expliquer aux contribuables comment il compte faire pour en finir sérieusement avec le vol de courant (branchement illégal et non-paiement des factures).
De l’aveu même du ministre, « les pertes non techniques (vol et non-paiement des factures) ne sont pas uniformes car elles varient entre les provinces de 9,6 à 58 %, et ensuite entre les régions de 15 à 78 %. De la même manière, il n’existe pas d’uniformité pour le taux d’encaissement (des factures) qui varie de 83 à 97 % en provinces et de 62 à 97,5 % dans les régions ».
Pour être plus précis, il faut voir d’autres sources. En février 2009, Éric Verdeil, un chargé de recherches au CNRS français, publia une étude dans la revue Tiers Monde, intitulée « Électricité et territoires : un regard sur la crise libanaise ». Selon cette étude, le taux de « vol » du courant électrique par région (factures non payées et consommation non facturée) varie entre 12 et 69 % selon les régions : Beyrouth 12,1 % – Mont-Liban nord 40,1 % – Békaa sud 45,6 % – Mont-Liban sud 49,6 % – Liban-Sud 56 % – Liban-Nord 60,7 % – Békaa -Nord 67,2 % – Békaa-centre 69,1 %.
Face à ces chiffres effrayants, que prévoit le ministre ? « La politique du secteur de la distribution est basée sur l’implémentation d’un programme transitoire et réaliste avec la participation du secteur privé, dans le cadre légal existant, et dont l’objectif est d’investir dans la planification, la construction, la gestion et maintenance des activités de la distribution, y compris la relève, la facturation et l’encaissement, utilisant des systèmes modernes et intelligents. » Oui, c’est sur cette base qu’il a réclamé et obtenu 1,2 milliard de dollars. Il prévoyait aussi une augmentation du tarif de 54 % d’ici à 2015. Il est évident, tant que l’État libanais est incapable d’obliger tout consommateur à payer sa facture et d’empêcher la fraude, il serait illusoire d’espérer sortir le Liban de ce gouffre financier.
Post Scriptum
1. Tant que les fraudeurs ne sont pas condamnés pénalement et moralement, le problème perdurera.
2. Tout plan doit répondre en premier lieu à deux questions élémentaires : comment empêcher les gens techniquement de frauder et comment intensifier le contrôle et les poursuites contre les fraudeurs ? Ce qui nous amène au noeud du problème : est-il possible de le faire sur tout le territoire sans que les agents de l’État ne risquent leur vie ? Si oui, pourquoi ne pas procéder à une phase-test pour s’en assurer ?
3. Si demain le Hezbollah déclenchait une guerre contre l’ennemi et que l’État hébreux bombardait nos centrales électriques neuves, qui payera la reconstruction ? Nous savons, hélas, que ce sera encore l’État, donc les citoyens qui payent honnêtement leurs taxes et leurs factures. Il est évident, tant que la décision de faire la guerre n’appartient pas uniquement à l’État libanais, que nous serons comme Pénélope avec sa tapisserie, condamnés à un éternel recommencement et aux éternelles coupures.
Voyons ce qu’il en est d’un peu plus près.
1. Le courant du Futur a aidé à priver le Liban d’électricité durant une vingtaine d’années.
Voici la liste des ministres qui se sont succédés à ce poste depuis la fin de la guerre civile :
1990-1992 : Mohammad Youssef Beydoun (proche de Hoss)
1992 : Mohammad Abdel-Hamid Beydoun (Amal)
1992-1993 : Georges Frem (indépendant)
1993-1998 : Élie Hobeika (parti Waad)
1998-2000 : Sleimane Traboulsi (proche de Hoss)
2000-2003 : Mohammad Abdel-Hamid Beydoun (Amal)
2003-2004 : Ayoub Hmayed (Amal)
2004-2005 : Maurice Sehnaoui (père de Nicolas Sehnaoui)
2005 : Bassam Yammine (Frangié)
2005-2008 : Mohammad Fneich (Hezbollah)
2008-2009 : Alain Tabourian (Aoun)
À partir de 2009 : Gebran Bassil (Aoun).
Aucun ministre « haririen » ! À part le court passage de Georges Frem, tous les ministres qui se sont succédés de 1990 à 2011 sont issus de partis qu’on peut désigner aujourd’hui par le camp du 8 Mars, pro-8 Mars ou anti-14 Mars. Aoun et le Hezbollah sont à ce ministère depuis plus de six ans.
2. Le plan n'a aucun défaut
Où donc ailleurs qu’au Liban paie-t-on 170$/mois pour 10 misérables ampères ? Alors question : pourquoi les ministres 8-marsiens n’ont-ils rien fait depuis vingt ans et se réveillent-ils seulement aujourd’hui? Bon, oublions le passé. Je me suis procuré le « Plan stratégique national pour le secteur de l’électricité » présenté par Gebran Bassil. J’ai choisi de me concentrer sur un point qui n’a pas été abordé et qui représente pour moi le véritable talon d’Achille de ce plan. En 39 pages de chiffres et de lettres, d’annexes et de nombreux tableaux, le ministre de l’Énergie et de l’Eau n’a pas réussi à expliquer aux contribuables comment il compte faire pour en finir sérieusement avec le vol de courant (branchement illégal et non-paiement des factures).
De l’aveu même du ministre, « les pertes non techniques (vol et non-paiement des factures) ne sont pas uniformes car elles varient entre les provinces de 9,6 à 58 %, et ensuite entre les régions de 15 à 78 %. De la même manière, il n’existe pas d’uniformité pour le taux d’encaissement (des factures) qui varie de 83 à 97 % en provinces et de 62 à 97,5 % dans les régions ».
Pour être plus précis, il faut voir d’autres sources. En février 2009, Éric Verdeil, un chargé de recherches au CNRS français, publia une étude dans la revue Tiers Monde, intitulée « Électricité et territoires : un regard sur la crise libanaise ». Selon cette étude, le taux de « vol » du courant électrique par région (factures non payées et consommation non facturée) varie entre 12 et 69 % selon les régions : Beyrouth 12,1 % – Mont-Liban nord 40,1 % – Békaa sud 45,6 % – Mont-Liban sud 49,6 % – Liban-Sud 56 % – Liban-Nord 60,7 % – Békaa -Nord 67,2 % – Békaa-centre 69,1 %.
Face à ces chiffres effrayants, que prévoit le ministre ? « La politique du secteur de la distribution est basée sur l’implémentation d’un programme transitoire et réaliste avec la participation du secteur privé, dans le cadre légal existant, et dont l’objectif est d’investir dans la planification, la construction, la gestion et maintenance des activités de la distribution, y compris la relève, la facturation et l’encaissement, utilisant des systèmes modernes et intelligents. » Oui, c’est sur cette base qu’il a réclamé et obtenu 1,2 milliard de dollars. Il prévoyait aussi une augmentation du tarif de 54 % d’ici à 2015. Il est évident, tant que l’État libanais est incapable d’obliger tout consommateur à payer sa facture et d’empêcher la fraude, il serait illusoire d’espérer sortir le Liban de ce gouffre financier.
Post Scriptum
1. Tant que les fraudeurs ne sont pas condamnés pénalement et moralement, le problème perdurera.
2. Tout plan doit répondre en premier lieu à deux questions élémentaires : comment empêcher les gens techniquement de frauder et comment intensifier le contrôle et les poursuites contre les fraudeurs ? Ce qui nous amène au noeud du problème : est-il possible de le faire sur tout le territoire sans que les agents de l’État ne risquent leur vie ? Si oui, pourquoi ne pas procéder à une phase-test pour s’en assurer ?
3. Si demain le Hezbollah déclenchait une guerre contre l’ennemi et que l’État hébreux bombardait nos centrales électriques neuves, qui payera la reconstruction ? Nous savons, hélas, que ce sera encore l’État, donc les citoyens qui payent honnêtement leurs taxes et leurs factures. Il est évident, tant que la décision de faire la guerre n’appartient pas uniquement à l’État libanais, que nous serons comme Pénélope avec sa tapisserie, condamnés à un éternel recommencement et aux éternelles coupures.