Michael
Young est contre le projet de loi orthodoxe. Il n’est pas le seul. Michael
Young ne semble pas porter les Forces libanaises (FL) et les Kataeb dans son cœur.
C’est son droit. Michael Young est de mauvaise foi. Il est là le problème. Je
ne répondrai pas en détail à son article publié le 19 avril sur le site Now
Lebanon (14 Mars) : Played for fools. Geagea is in a tough spot (Pris pour des imbéciles. Geagea dans une
situation difficile), Georges Melhem, du service de la communication du
parti des FL, s’en est chargé avec pertinence et ironie : The Lebanese Forces Communication Department Responds to Michael Young’s article. J’aimerai
seulement aborder quelques points où l’on prend Michael Young, de père
américain et de mère libanaise, en flagrant délit de malhonnêteté par mensonge,
le manquement déontologique le plus grave pour un journaliste qui prétend avoir
l’esprit et la plume indépendants.
Passons
tout d’abord mourour el kiram sur l’abus de superlatifs propres à la
propagande et sur cette haine sous-jacente des Forces libanaises et de Samir
Geagea, que certains ont du mal à contenir. Je cite : « They (the
Lebanese Forces and the Kataeb) have been played for fools by Hezbollah,
Parliament Speaker Nabih Berri, and Michel Aoun... What is most disturbing is
that the LF, from the start, was dishonest about their intentions toward the
Orthodox proposal... From a Christian perspective, Geagea has won nothing...
The Christians are still paying a heavy price for the rivalry between Geagea
and Aoun, as if one bout of communal self-destruction were not enough... As if
we were not wise to the sly political calculations of the Lebanese Forces leader.
» Toutes
ces tournures ne doivent rien au hasard. Elles reflètent l’anti-forces-libanaisisme
primaire de Michael Young. Mieux vaut ne pas s’attarder sur ces généralités
vaseuses qui n’apportent rien au débat. Allons donc à l’essentiel dans
l’intérêt de notre pays.
Dans toute action
« militante », pour utiliser un mot politiquement correct, ou de « propagande »,
ta n2oula bel mchabra7, on retrouve une
clé de voute et des piliers. Malgré le fait que l’article de Michael
Young est décousu et contient des contradictions évidentes, il n’échappe pas à
cette règle.
Commençons par les
piliers sur lesquels Michael Young a bâti son article. Ces piliers,
construits presque à l’identique, s’apparentent à un leitmotiv politique. Il s’agit d’une idée
récurrente qui revient sans cesse. Michael Young, en bon Libanais qu’il est,
veut nous l’imposer, beddo yécharébna
yaha bel ma3él2a Allah wakilkoun! Lisez, vous comprendrez tout de suite. « They (the Lebanese Forces and the Kataeb)
will have to admit that they ran into a trap, led to endorse a proposal
(Orthodox) that would break March 14 apart and prevent it from winning a
parliamentary majority... The Lebanese Forces and Kataeb are denying March
14 a victory through an attitude that may carry Lebanon into a destabilizing
political void... Having been drawn out into a limb, the Lebanese Forces and
Kataeb then decided to saw it off by declaring that they would not participate
in elections held on the basis of the 1960 law... The parties' attitude will
lead to a vacuum if no alternative election law can be agreed, the decision is
astonishingly reckless... The stupidity
of the Lebanese Forces and Kataeb is painful to watch. At a moment when the
overriding necessity, in light of the Syrian conflict, was to gain a parliamentary
majority for March 14, or at least prevent Hezbollah from doing so, the two
parties preferred to pursue their own trifling agenda. » On
ne peut pas être plus clair. Par ce leitmotiv, Michael Young veut détourner l’attention des lecteurs des revendications
démocratiques légitimes défendues par les Forces libanaises et les Kataeb pour
améliorer la mauvaise représentation chronique des électeurs libanais où un
quartet d’hommes musulmans, Hariri-Joumblatt-Berri-Nasrallah, décide du ¾ du
Parlement libanais, dont la moitié des députés chrétiens. Information que
Michael Young ne juge pas utile de communiquer à ses lecteurs. Il n’en dit pas un
mot, naturellement, obnubilé par débiter ses « stupidités ». Au
passage, Michael Young ne peut point ignorer que ce qui a brisé le 14 Mars ce
sont les coups de poignard de Walid Joumblatt depuis août 2009, dont le dernier
en date, le 12 janvier 2011, a permis au Hezbollah de prendre les rênes du
pouvoir de Saad Hariri. Il a bien raison, les stupidités sont « paintful to watch » !
La clé de voute est
l’élément le plus important de l’édifice de Michael Young. Cet élément permet de
comprendre le but principal de l’article du journaliste de Now Lebanon. « Since that law (1960) is one of the few means that
March 14 has of gaining a majority in parliament ». Eh
bien, là aussi, on ne peut pas être plus clair! Cette phrase clé n’a qu’un but,
faire croire aux (é)lecteurs libanais que seule la loi de 1960 permettrait au
14 Mars de gagner les élections. Ainsi, Michael
Young souhaite clairement que les prochaines élections législatives se
déroulent sous la loi de 1960. Ce que le journaliste de Now Lebanon s’est bien
gardé de préciser à ses lecteurs, c’est que par son soutien explicite à la loi
de 1960, comme jadis toutes les forces politiques non chrétiennes, Courant du
Futur compris (qui a toutefois assoupli sa position intransigeante du départ), il se retrouve avec Walid Joumblatt dans
les derniers retranchements des défenseurs de cette loi d’un autre âge.
Rappelons au passage aussi, que le Beik est le seul à s’être empressé de
déposer les candidatures de son bloc politique aux élections législatives
justement sous la loi archaïque de 1960, il y a quelques jours, le jour
même où les Forces libanaises, ont proposé lors de la réunion des leaders
chrétiens à Bkerké, de suspendre l’appui au projet de loi orthodoxe. Cela devrait
permettre d’évaluer la sincérité des uns et des autres dans la volonté de
trouver une alternative sérieuse à la loi de 1960. Une information que Michael
Young a zappé, évidemment.
Outre
le fait que les allégations électorales du journaliste du (Lebanese) Daily Star,
ressemblent aux prévisions à la Michel Hayek, et peuvent se révéler aussi
foireuses que celle de la fin du monde prévu par les Mayas, tout le monde l’a
compris, Michael Young voudrait pousser
les (é)lecteurs libanais à déduire deux choses:
1. En réclamant une
loi électorale qui améliore la représentation des électeurs libanais, Samir
Geagea pourrait être responsable de la déroute du 14 Mars aux prochaines
élections législatives. Ce sont les piliers de l’article de Michael Young. C’est ce qu’on appelle en psychologie, le
« conditionnement » des cobayes-lecteurs-libanais, pour les
préparer à avaler des couleuvres.
2. Les prochaines
élections législatives doivent se dérouler sous la loi de 1960, qui est la
meilleure qui soit. C’est la clé de voute de l’article de Michael Young, les
couleuvres de Michael Young, la finalité même de la propagande de Michael Young.
La propagande est selon le
dictionnaire, « la diffusion
d'idées auprès d'un large public, destinée à lui faire adopter certaines
opinions politiques et à influencer ses choix électoraux et son comportement
social ». C’est à cette manœuvre malhonnête et méprisable que s’est
livrée Michael Young dans son dernier article. Rappelons en effet, que la loi de 1960 qui divise le Liban en de
grandes circonscriptions, convient à tout le monde, sauf aux partis chrétiens.
Elle permet aux partis musulmans de contrôler l’élection de la moitié des
députés chrétiens, pas dans l’autre sens. Alors qu’un candidat chrétien dans la région d’Aley par exemple, ne peut pas
être élu s’il n’est pas agréé par le Beik parce que les druzes, 52% du caza
d’Aley, votent en bloc selon la direction indiquée par la girouette de
Moukhtara, Michael Young trouve que, «
The reality is that both Geagea and the Kataeb have tied themselves up in knots
through their maneuvering, and the Lebanese in general as well as Christians in
particular lose from their choices. » « Choices »,
c’est c’là oui ! Eh bien, on ne dirait pas que nous vivons dans le même
pays Mister Young ! Pire, alors que les électeurs chrétiens des régions mixtes, du Sud, du Nord, de l’Est
et même de Beyrouth, ne se donnent même plus la peine de se déplacer dans les
bureaux de vote, le journaliste américain s’inquiète avec une naïveté surprenante,
« How are Christians living in mixed
districts to fare when two of their leading communal political parties are
pursuing greater isolation? Did Geagea and the Gemayels think of them at all when
they approved of the Orthodox proposal? » Geagea
et les Gemayel, des « isolationnistes »,
le mot qui tient à cœur de Walid Joumblatt, n’est-ce pas ! Comment diable
un journaliste peut-il ignorer que si on est arrivé là, c’est justement parce
que les électeurs chrétiens des régions
mixtes sentent au fil des élections, que leurs voix ne servent absolument à
rien, tout est décidé par le quartet
musulman. Marhaba ta3éyoch Mister
Young ! Il y a encore pire. Tout le monde sait que chiites, sunnites, druzes et chrétiens, « votent
en bloc » et depuis des lustres aux seuls candidats de leur communauté et
aux candidats des autres communautés uniquement s’ils sont alliés à leur
communauté. Cette situation est si absurde qu’on peut dire que la loi de 1960, transforment les élections
législatives en « désignations législatives ». Elle constitue un
terrain d’épanouissement de l’esprit de la loi orthodoxe : elle perpétue la
pratique du vote en bloc pour les seuls candidats de sa communauté et
uniquement pour les « alliés de force » de sa communauté ! Voilà la triste
réalité de notre démocratie. Elle a étrangement, et naturellement, échappé
à Michael Young. Tout en soutenant cette loi archaïque,
alors que Samir Geagea est déterminé à l’abolir, Michael Young a le culot de préciser, « How odd to hear Geagea speak
about revitalizing the Lebanese state when he now backs a plan that will only
further break up the state. » Il n’y a pas à dire, l’hypocrisie
schizophrénique fait des miracles !
Eh
bien, après la lecture de l’article polémique, on se demande pourquoi un journaliste
aussi informé que Mister Young, n’a pas osé préciser que Saad Hariri et Walid Joumblatt sont toujours attachés à la loi de 1960,
parce qu’ils craignent que si les électeurs chrétiens retrouvaient leur
indépendance et si le vote était restreint aux électeurs de leur communauté
respective, sunnites et druzes, ils risqueraient de perdre la moitié de leurs
blocs parlementaires. Voilà une autre réalité amère, que Michael Young a
zappé. Et tout ce que l’on dit en dehors de cela, n’est qu’un bordel de
foutaises.
Aujourd’hui,
ce qui semble choquer une partie des Libanais ce n'est pas la tare de notre
système électoral et la violation à répétition de la démocratie libanaise, caractérisée
par la mauvaise représentation parlementaire des électeurs libanais en général,
chrétiens en particulier, mais la légalisation d'un code électoral des usages
actuellement suivi scrupuleusement par les électeurs libanais, toutes
communautés confondues, à toutes les élections : voter uniquement pour sa
communauté et aux alliés de force de sa communauté, l'esprit de la loi orthodoxe,
actuellement en cours. Pathétique. Faut-il vraiment rappeler qu’une loi électorale n’a pas vocation à faire
gagner un homme, un parti ou un camp, encore moins à perpétuer une tare électorale, comme le souhaite Michael
Young, mais à améliorer le plus
possible la représentativité parlementaire, comme le réclame Samir Geagea
précisément, et comme le demandent les partis chrétiens réunis à Bkerké ? Etant américain, Michael Young le sait. Il n’aurait pas dû l’ignorer. C’est le
but des élections au sens noble du terme. Rien ni personne n’est au-dessus
de la démocratie.
Certes, la meilleure
loi électorale, selon les normes démocratiques occidentales, se base sur la
circonscription uninominale. Mais, quand je pense qu’on
n’arrive même pas à diviser le Liban en 50 circonscriptions, projet proposé par
les Forces libanaises et refusé par le quartet musulman à l’unanimité, je
me dis qu’il n’y a pas de doute, nos élections ne sont que des mascarades
démocratiques. Diviser le Liban en 128 circonscriptions, prête au
sourire, cela relève de l’utopie. Tous les projets en discussion tournent
autour du découpage électoral du pays du Cèdre en une trentaine de
circonscriptions, bien en deçà du projet des FL. Par comparaison, la loi de 1960 divise le Liban en 26 circonscriptions
seulement ! Tout est là, la messe est dite. Cette loi féodale par essence, convient
à tout le monde sauf aux communautés chrétiennes. Certaines forces du pays, comme Walid Joumblatt, veulent garder leur
poids politique au détriment des autres et plus grave encore, au détriment de
la démocratie !