Cela
fait un an que le Liban n’a plus de président de la République. On peut encore disserter
pendant une autre année reconductible, jusqu’au dernier jour de ce mandat
virtuel qui prendra fin en 2020, sur les raisons de ce triste blocage de la vie
politique libanaise, sans réussir pour autant à faire avancer la réflexion d’un
iota. En même temps, il est impossible de laisser passer cette date comme si de
rien n’était. En pensant à un angle original pour aborder la présidentielle
libanaise, je me suis dit que le mieux à faire serait d’aller voir où ils en sont nos principaux candidats à
la présidence de la République libanaise, Michel Aoun et Samir Geagea.
Le choc des Titans n’ayant pas pu avoir lieu
dans l’arène parlementaire, on nous a annoncé comme lot de consolation une rencontre
entre les deux hommes dans les coulisses politiques. L’annonce a été faite il y
a tellement longtemps, que ces retrouvailles
interchrétiennes n’intéressent plus personne aujourd’hui, à part Télé-Liban
et Télé-Lumière. Idem pour ces rencontres
intermusulmanes, entre le Futur (sunnite) et le Hezbollah (chiite), mises
en place depuis un moment. Dans les deux cas, c’est la débandade au sein de la
société libanaise. Eh oui, les leaders chrétiens oublient qu’il faut savoir
arrêter les préliminaires à un moment et passer à l’acte, et les leaders
musulmans oublient qu’une relation stérile ne passionne pas les foules.
Toujours est-il que du côté du président du parti des Forces libanaises (FL), candidat
désiré du camp du 14-Mars, la problématique de la présidentielle libanaise est
plutôt simple. Comme l’exige la Constitution libanaise, notamment les articles
74 et 75, « En cas de vacance de la
présidence par décès, démission ou pour toute autre cause, l’Assemblée se
réunit immédiatement et de plein droit pour élire un nouveau Président... La Chambre
réunie pour élire le Président de la République constitue un collège électoral
et non une assemblée délibérante. Elle doit procéder uniquement, sans délai ni
débat, à l’élection du Chef de l’Etat », tous les députés de la nation ont
le devoir patriotique de se rendre au Parlement pour élire le président de la
République libanaise. Ainsi, pour Hakim,
la bataille démocratique seule doit déterminer qui sera l’heureux élu.
C’est très noble sauf que 23 séances électorales plus tard, on n’a pas pu
concrétiser ce qui est prévu par la Constitution libanaise, parce que les
députés du camp du 8-Mars, notamment ceux du duo inséparable, Michel Aoun et Hassan Nasrallah, ont
boycotté les séances électorales. A défaut de quorum, 2/3 des
parlementaires (86/128 députés), seule la première séance a pu avoir lieu.
Samir Geagea recueillit 48 voix, Michel Aoun, aucune.
Du
côté du secrétaire général du Hezbollah, le moteur du boycott, la problématique de la présidentielle libanaise
est simple aussi, mais pas pour les mêmes raisons que pour les FL. Lorsqu’on est enlisé dans une guerre sans
fin en Syrie, « nous combattons...
à Damas, à Alep, à Deir Ezzor, Qousseir, Hassaké et Idlib (...) nous serons
présents partout en Syrie où notre présence est requise pour la bataille »,
subissant de lourdes pertes sur les plans humain et financier, perdant du
terrain dans le Qalamoun (de l’autre côté de l’Anti-Liban), s’engageant dans
une « bataille existentielle » qui
pourrait exiger de la milice chiite une « mobilisation
générale », eh bien, « toutes les autres (batailles) passent
au second plan », Hassan Nasrallah l’a fait savoir urbi et orbi
tout juste hier. Dans ce contexte, il faut comprendre que l’élection d’un
président de la République, chrétien maronite de surcroit, comme le veut le
Pacte nationale de 1943, est le cadet de ses soucis. Pire encore, la vacance présidentielle arrange les
affaires du Hezbollah, sachant que le président de la République libanaise,
en dépit de l’amputation de ses prérogatives par l’accord de Taëf, demeure le
« haut commandant des forces armées libanaises ». Ainsi, il est évident
que la milice chiite ne veut pas prendre
le moindre risque de voir s’installer à Baabda, et pour six ans svp, ce qui
constitue une éternité au Moyen-Orient, un
homme souverainiste fort, comme Samir Geagea, qui demande clairement dans son
programme présidentiel, entre autres, le déploiement immédiat de l’armée
libanaise le long de la frontière syro-libanaise (avec ou sans l’aide de la
FINUL), le contrôle de cette frontière passoire d’une main de fer (dans les
deux sens), une stricte limitation du pouvoir de déclarer la guerre et la paix
à l’Etat libanais (actuellement entre les mains d’une milice sectaire, qui a fait
allégeance de ses propres aveux, au Wali
el-faqih, le Guide suprême de la République islamique d’Iran, Ali Khamenei)
et le respect absolu de la Déclaration de Baabda (consensus interlibanais qui
prône la « neutralité » du Liban).
Le problème se complique par le fait que le Hezbollah ne veut pas prendre le risque
de voir s’installer à Baabda même un homme comme Michel Aoun, par crainte
que l’habit présidentiel ne mue son fidèle allié en un souverainiste
intransigeant, surtout s’il est appâté par les puissances loco-régionales, le
14-Mars et l’Arabie saoudite. Cette crainte est amplifiée par un autre fait, la
confession chrétienne de Michel Aoun. Tout le monde sait qu’il n’y a pas un
planton chrétien qui travaille ne serait-ce que pour la chaine de télévision du
Hezbollah. Dans le passé, « lointain » diront les gens embarrassés,
Hassan Nasrallah n’a-t-il pas déclaré que la force du Hezbollah vient du fait
qu’il a un fonctionnement secret et que ce secret ne peut être conservé que parce que le parti
et sa milice sont exclusivement chiites ? Ainsi, et ce n’est qu’un secret
de Polichinelle, un de plus, Sayyed n’a aucune confiance dans le Général. Il fera tout pour
l’empêcher d’accéder à la magistrature suprême. Il a mis des mois avant de soutenir sa candidature officiellement et ne l'a fait que lorsqu'il s'est assuré que l'élection de l'homme est quasi impossible.
Les manœuvres
de diversion de Hassan Nasrallah pour captiver, séduire ou effrayer les
communautés chrétiennes libanaises, comme celle à laquelle nous avons assisté
hier, « Je ne veux faire pas peur aux gens,
‘bass ma badna ned7ak 3ala ba3ed’. Je voudrais demander aux chrétiens du Liban :
est-ce que la position de tel ou de tel dirigeant et leader du 14-Mars et parti
du 14-Mars, constitue une garantie réelle qui vous protège du massacre, du meurtre,
du pillage, et met vos femmes à l’abri du rapt et sauvegarde vos églises de la
destruction ? », ne
sauront détourner l’attention des Libanais du fait que l'élection présidentielle libanaise est une priorité absolue pour eux, et pour les communautés chrétiennes en particulier, et que le Hezbollah ne veut ni
de Michel Aoun ni de Samir Geagea ni d’aucun chrétien fort à la tête de l’Etat
libanais. Un épouvantail fera largement l’affaire de la milice chiite et de l'axe Damas-Téhéran.
Du
côté du président du Courant patriotique libre (CPL), le candidat
non-désiré du camp du 8-Mars, la problématique de la présidentielle libanaise
est également simple, mais pas pour les mêmes raisons que pour les FL et le
Hezb. Pour bien la comprendre, il suffit de décortiquer son dernier discours prononcé lors d’une rencontre avec
les militants de son parti ce weekend. Comme dans mon article sur le Corleone à 5 piastres, Michel Samaha, je
ne respecterai pas la chronologie dans les extraits que je vous propose. Je
vous ferai un montage qui permet de mieux ressortir les desiderata et les incohérences de
Michel Aoun.
Comme d’habitude, le général n’a rien à se
reprocher. D’emblée, il se place en
victime. « Nous sommes
aujourd’hui sous le choc... en raison du comportement de nos partenaires de la
patrie qui croient que nous sommes des ouvriers chez eux (...) Nous sommes
visés... Ils se déclarent tous comme tuteurs sur nous. » Mieux vaut en
rire et passer aux choses concrètes. Michel Aoun s’autorise de juger le passé des autres, alors qu’il n’y a vraiment
pas de quoi pavoiser dans son cas. « Nous
les avons essayé 15 ans ». Qui au juste ? Personne ne sait. Ce
qui est sûr c’est que le général évoque la période de terreur instaurée entre
1990 et 2005 par le système sécuritaire syro-libanais mis en place par la tyrannie des Assad,
père et fils, avec laquelle il est allié officieusement, depuis 2004, et
officiellement, depuis 2008, une alliance scellée lors de sa visite historique à Bachar el-Assad. Alors, un peu
de cohérence, ne ferait pas de mal. « Nous
avons vu où étaient les références chrétiennes, et comment elles avaient peur
et se cachaient dans leurs résidences ». Tiens, tiens, et pendant ce
temps, le général était bien planqué en France. Il s’est bien gardé de préciser
que son retour au Liban est le fruit d’un arrangement politique avec les
Syriens, selon plusieurs sources proches de lui à l’époque de son exil.
Le général s'est taillé ensuite un portrait sur mesure, utile pour revenir au
palais de Baabda. « Nous avons
refusé la ‘turquisation’ dans le passé. Un refus pour nous défendre et défendre
les Arabes. Regardez ce que fait la Turquie aujourd’hui. » Du grand
n’importe quoi, alors zappons à quelque chose de plus consistant. « Nous
avons rejeté la Syrie, quand elle exerçait une tutelle sur nous. Pour cela,
quand elle est sortie du Liban, j’ai
essayé d’établir avec elle les meilleures relations, comme je l’ai promis,
car je respecte les promesses et les alliances. » Mais, voyons, le
général est un homme de parole et d’honneur. Et que pense-t-il de l’affaire Michel Samaha qui a failli embraser
le Liban à la demande de Bachar el-Assad ? « Nous commenterons (la décision de justice) un autre moment ».
Mais voyons, pourquoi se presser, il n’y a pas mort d’hommes ?
Tout cela ne l’empêche pas d’être exigeant, sauf avec lui-même. « Je souhaite rappeler au ministre de
la Défense... qu’il est censé appliquer la loi et nommer un commandant de
l’armée et non de proroger une situation illégale. S’il n’en est pas capable,
qu’il démissionne. » Et moi, Bakhos Baalbaki, je souhaite rappeler au
député du Kesrouan, qu’il est censé apprendre par cœur les articles 74 et 75 de
la Constitution libanaise, cités précédemment. Et s’il en est incapable, il n’a
qu’à démissionner et aller pêcher la sardine en Méditerranée, je m’engage à lui
offrir les appâts.
Le
meilleur du discours du général, se trouve sans aucun doute dans ce qu’il a dit
au sujet du « pacte national ». C’est un passage d’anthologie. Michel
Aoun y reviendra même à trois moments différents de son discours. Hasard des coïncidences,
je suis actuellement sur un projet de court-métrage américano-libanais, qui
parlera de la guerre du Liban et du foot, où nous avons abordé justement le
« Pacte ». Il a fallu y revenir à 36 reprises, sans exagération, pour
parvenir à trouver l’expression finale d’une malheureuse phrase qui sera insérée
dans le film. C’est pour vous dire, que j’ai eu largement le temps de plonger
dans notre « pacte nationale » et de me faire ma petite idée sur
cet élément fondateur de la République libanaise. Vous serez informer du
court-métrage, en temps et en heure, restons sur le discours de Michel Aoun. « Ils ont oublié qu’il y a un pacte
(nationale) et des droits communautaires. » Mais qui
sont-ils au juste ? Toujours ces obscurs ennemis comploteurs qui se
liguent contre le général. J’ai des réserves sur sa formulation, mais
admettons. « Selon le Pacte, les postes du président de la République, du
commandant de l’armée et tous les emplois de la première catégorie qui reviennent
aux chrétiens est un droit pour nous. Nous représentons la majorité chrétienne,
nous avons le droit de les nommer, au gouvernement de confirmer ces
nominations. » Dans ce passage, Michel Aoun commet trois erreurs. Primo, il réduit le « Pacte
national » établi entre les leaders libanais en 1943 à une
distribution de postes entre les tribus libanaises, alors que ça lui a échappé,
bien qu’il soit né avant le « Pacte »,
que l’objectif de cet arrangement national
est de renforcer la confiance mutuelle entre les communautés libanaises
islamo-chrétiennes, un élément qui ne semble pas préoccupé le général, comme le
prouve magistralement le discours de ce weekend. Secundo, la notion de « majorité chrétienne » n’a strictement aucune
valeur constitutionnelle. Tertio, l’accession
à la présidence de la République libanaise ne se fait pas à travers une
nomination que le gouvernement doit confirmer, mais bel et bien via une
élection démocratique au suffrage parlementaire. Nuance et de taille.
Bien que le général Michel Aoun ne semble rien
connaitre à l’esprit du « Pacte national libanais », cela ne l’a pas
empêché en se basant sur une fausse interprétation du pacte, de hausser le ton
et d’être menaçant. « Quiconque au pouvoir qui ne veut pas respecter les lois et les
mérites, et qui ne souhaite pas travailler selon la conscience nationale libre,
il sera en confrontation avec nous, et j’insiste sur le fait qu’il sera en
confrontation avec nous (...) Nous ne permettrons jamais, à qui que ce soit,
des pays ou des individus, qu’ils nous imposent ce qu’ils veulent. Nous en
avons assez. J’accepterai une autre guerre sur nous, comme celle de 1990, s’ils
ne respecteront pas la Constitution et le Pacte. » C’est grave. Et
même très grave, pour au moins trois
raisons, là aussi. Primo, personne
ne lui impose rien, on lui demande de cesser cette paranoïa et de remplacer
son jeu enfantin, qui consiste à bouder les séances électorales en violation de
la Constitution libanaise, par le jeu démocratique. Secundo, le général est prêt à aller jusqu’à la
guerre pour se faire introniser sur le fauteuil de Baabda. Il le dit avec
une légèreté consternante. Tertio, quand on est directement à l’origine de deux
guerres meurtrières et destructrices, dont celle de 1990 et qui s’est terminée
par sa fuite à l’ambassade de France, on
évite de faire la moindre référence à ce passé peu glorieux pour l’homme en
question et pénibles pour l’ensemble de la population libanaise, notamment
chrétienne.
En tout cas, quelques minutes plus tard, Michel Aoun se contredit en affirmant
que « les leaderships qui sont basés
sur le sectarisme et qui n’attribuent les postes (administratifs) qu’à ceux qui
sont de leur doctrine politique, et pas seulement de leur communauté religieuse,
doivent cessés. » Pire encore, le
voilà à un autre moment contredisant sa contradiction. « Vous êtes ceux qui
nomment le président et les chefs chrétiens. C’est à vous de choisir ce que
vous souhaitez et non aux autres de vous imposer ce qu’ils veulent. » La suite est faite de populisme au ras des
pâquerettes. « Nous sommes les
gardiens de la patrie, son origine... Nous sommes les plus forts, parce que
nous sommes le peuple ». Bassita,
admettons. « Ils vous ont interdit
de porter votre voix et vous ont empêché de voter, et ils ont prorogé leur
mandat deux fois ». Wlak ya
3ammé, qui ça « ils » ? Mais bordel, tu fais partie de ce
« ils »! Et dans le populisme, il y est et il y restera. « Quand on leur a proposé que ça soit
vous qui choisissez le président de la République (le peuple), sans qu’ils
aient besoin de demander l’avis des pays étrangers, ils ont refusé. Mais, c'est bien vous qui nommerez le président de la République contre leur gré. »
Deux phrases et voilà deux violations de
la Constitution libanaise et du Pacte national, dont le respect semble le préoccuper.
Dans ce
discours, Michel Aoun dira tout et son contraire. Alors qu’il
affirme par exemple que « nous voulons construire un Etat et des
institutions, une armée et des forces de sécurité. Nous ne voulons pas les
politiser comme ils le faisaient. Le commandant de l’armée est pour tous les
Libanais », cela ne l’empêche pas d’affirmer à un autre moment que « personne
ne peut nommer un président pour
nous, personne ne peut nommer un commandant de l’armée pour nous. C’est
nous qui les nommons, que ça plaise ou non ». Curieux personnage le
général. Pour lui faire plaisir, voici à
quoi devra ressembler le Liban de demain : Michel Aoun himself, président de la République ; Gebrane Bassil, son gendre et dauphin,
ministre à vie (titre transmissible par héritage de préférence) ; Chamel Roukouz, militaire brillant mais pas de bol, gendre du
général, commandant de l’armée libanaise. Rien de prévu pour
le 3e gendre, au moins pour le moment.
Pour être le plus largement compris, le président du CPL aura recours à une
métaphore qui était censée frappée les esprits. Elle a frappé le miens en
tout cas. « Nous n’accepterons que le plus fort et le plus représentatif à
la tête du pouvoir (...)
Nous refusons qu’ils nous sortent chaque
fois un lapin de leurs poches... nous avons fini avec le jeu des lapins (...)
Voilà pourquoi nous souhaitons passer le
pouvoir à des personnes qui ont une voix, une position, une éthique ».
Je rejoins sans réserve Michel Aoun sur
sa dernière revendication, même si nos avis divergeront sur le choix de
celui qui répondra à nos exigences communes. Mais, mettons-nous d’accord au moins sur une chose, on ne sort pas les
lapins des ‘poches’, mais des ‘chapeaux’, et ce n’est pas Louis Comte, le prestidigitateur
de Louis XVIII, qui nous dirait le contraire. S’il fut le premier à accomplir
une telle performance dans un caveau à Paris en 1814, le général de Rabié est en passe de devenir aujourd’hui, le roi
incontesté de l’illusionnisme politique dans nos contrées d'Orient.
Cela
fait près de 40 ans que Michel Aoun est dans le paysage politico-militaire
libanais,
depuis au moins cette réunion secrète à la fin de l’été 1981, où il s’est
retrouvé dans un couvent avec une quinzaine d’hommes chrétiens, dont Samir
Geagea, réunies autour de Bachir Gemayel afin d’établir un plan pour permettre
au chef des Forces libanaises d’accéder au pouvoir l’année suivante. Depuis, beaucoup
d’eau a coulé sous les ponts. Aujourd’hui, les deux compagnons de Bachir se
retrouvent pratiquement à la même place, avec presque le même état d’esprit. Il
ne sera pas possible de résumer dans cet article, qu’est-ce que Michel Aoun et Samir Geagea ont apporté au Liban ?
L’histoire s’en chargera. Mes articles aussi. Mais, comme nous commémorons en
ce jour le premier anniversaire de la vacance présidentielle, tout ce que retienne une partie des
Libanais de la longue carrière mouvementée des deux hommes, c’est que Michel
Aoun, à la différence de Samir Geagea, est impliqué directement dans trois des quatre
périodes de vacance présidentielle que la jeune République libanaise ait connue.
Comme le montre la 1re représentation graphique, al-joumhouriyat
al-loubnaniyat a été sans président de la République, officiellement ou de
facto, 1 304 jours au total, en 71 ans d’Indépendance. Wlak aya joumhouriyé, aya mozz, aya ballout.
Un petit calcul fait apparaitre que Michel Aoun est le seul dirigeant politique
libanais à être impliqué dans 1 299 des 1 304 jours de vacance du pouvoir que
nous avons connus, soit 96,62% des vacances du pouvoir au Liban, ce qui
représente une violation très grave de la Constitution libanaise, et pose un
problème éthique et moral quant à son élection. Indépendamment de nos
divisions politiques et des programmes électoraux des uns et des autres,
comment élire quelqu’un qui détient ce triste record sachant que tout président
fraichement élu de par les articles 49 et 50 de la Constitution de la
République libanaise « prête serment de
fidélité à la Constitution, promet d'observer la Constitution et s'engage à
veiller au respect de la Constitution »? Impossible. On ne pourra pas faire
confiance à cet homme. Ainsi, il est
grand temps de considérer qu'il existe une incompatibilité entre Michel Aoun et
la Constitution libanaise. Le général doit donc être déclaré inapte à
devenir le 13e président de la République libanaise et cet article considéré
comme 3élm wou khabar.
Avant que je n’oublie et avant de violer une nouvelle fois la
Constitution libanaise et le Pacte nationale, pour permettre d’élire le
président de la République libanaise au suffrage universel, une mesure à
laquelle je suis fondamentalement opposé dans le contexte actuel, le dernier discours
du général Michel Aoun le plus sectaire et le plus décousu jamais prononcé, doit
nous amener aujourd’hui à nous poser une
question de bons sens : faut-il imposer une limite d’âge aux candidats à
l’élection présidentielle libanaise ? La 2e représentation graphique apporte une réponse sans
ambiguïté. La suite du feuilleton « Wlak aya joumhouriyé, aya mozz, aya ballout » le 3
juin, pour la 24e séance d’élection du président de la République
libanaise, qui sera boycottée comme prévu par Michel Aoun et Hassan Nasrallah, comme les 22
qui l’ont précédé. Le peuple libanais est pour l'instant condamné à regarder cette libre adaptation du film Groundhog Day (Un jour sans fin), en attendant des jours meilleurs. Mais, que personne ne s'y trompe, ces jours viendront, comme dans le film avec Bill Murray
et Andie MacDowell.