dimanche 7 septembre 2014

L’hypocrisie du 8 Mars au sujet d'éventuelles négociations du Liban avec "l’Etat islamique" concernant les otages libanais (Art.241)


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Et l’horreur devient routinière ! Un autre soldat libanais aurait été égorgé par « l’Etat islamique » ce weekend. Et de nouveau la sincérité des uns doit affronter l’hypocrisie des autres. D’un côté, des larmes de sang et de l’autre côté, des larmes de crocodile. Et au lieu de tout faire pour protéger le Liban de ce genre de crime odieux, les hypocrites sans frontières veulent enfoncer davantage le pays, son armée et son peuple, dans le bain de sang syrien.

Alors que le Liban se trouve dans un sacré merdier, le 8 Mars s’oppose -encore, toujours et plus que jamais- au déploiement de « l’armée libanaise » à la frontière syro-libanaise, comme cela se fait en toute logique et dans tout pays normal. Bala laff wou dawarann, tout le monde sait que cette opposition vise à permettre à la « milice chiite libanaise » d’aller combattre les « milices sunnites syriennes », pour mieux aider la « dictature alaouite syrienne » à bien écraser le « soulèvement sunnite syrien ». C’est quand même hallucinant quand on y pense. Et l’on s’étonne encore des répercussions de cette agression intercommunautaire transfrontalière. Non mais, de grâce que les forces du 8 Mars nous épargnent leurs manœuvres de diversion, afin de brouiller les esprits des Libanais avec des allusions farfelues sur la complicité du 14 Mars avec « Daech », wel bi2a el 7adina. C’est d’un grotesque !

Dans tous les cas, un peu de logique n’a jamais fait de mal à personne, sauf aux abrutis et aux hypocrites. Les islamistes emprisonnés à Roumieh sont de diverses nationalités. Il y a beaucoup de Libanais, mais aussi des Syriens et des Palestiniens. Certains sont impliqués dans des attentats récents, d’autres dans des attentats beaucoup plus anciens. Une partie purge sa peine, l’autre croupit en prison depuis des années, sans jugement. Toujours est-il que les djihadistes de « l’Etat islamique » réclament leur remise en liberté en échange de la libération d’une trentaine de militaires libanais, de l’armée libanaise et des Forces de sécurité intérieure, kidnappés à Ersal au début du mois d’août.  

Comme on le voit le problème des « islamistes de Roumieh » est beaucoup plus complexe que ne veulent faire croire les simplistes de tous bords. Ceux qui sont détenus sans jugement, n’ont pas été jugés justement parce que certains responsables veulent éviter d’avoir à les condamner et de subir par la suite, la terreur des terroristes. Alors, en gros, on fait l’autruche. Une solution « à la libanaise » qui s’inscrit dans une tradition nationale qu’on peut résumer par la boutade philosophique d’Alfonse Allais, « ne remets pas à demain, ce que tu peux faire après-demain ». Ce qui est plus grave c'est que d'autres responsables libanais ne veulent pas les juger, pour ne pas avoir à juger dans la foulée, trois grands terroristes « made in Lebanon », des criminels qui n’ont rien à envier aux islamistes de Roumieh et aux djihadistes de Daech. Eh na3am ! 

A leur tête, Michel Samaha, un comparse chrétien issu des rangs du 8 Mars. Cet ancien ministre se préparait à la demande personnelle de Bachar el-Assad via Ali Mamlouk, le chef de la sécurité nationale syrienne, à commettre avec 24 charges explosives ramenées de Syrie, 24 attentats à caractère confessionnel et djihadiste dans le Nord du Liban, dont certains devaient viser le patriarche maronite, Béchara Raï, et des députés sunnites dans la région de Akkar. Il a été arrêté en août 2012 et se trouve donc en prison depuis plus de deux ans. Il n’a toujours pas été jugé alors que son dossier est bouclé depuis qu’il a reconnu les faits qui lui sont reprochés. Et ces faits qui relèvent du terrorisme, sont suffisamment graves que les forces du 8 Mars ne pouvaient plus le protéger, alors qu’elles étaient seules au pouvoir entre 2011 et 2013, sauf en faisant l’impossible pour retarder son jugement, qui pourrait conduire d’après la législation libanaise, à son exécution. D’ailleurs, la peine de mort a été requise à son encontre par le juge d'instruction de l'armée libanaise. Mais, faut pas rêver, qui de la classe politique au Liban aujourd’hui, oserait laisser condamner et exécuter Michel Samaha ? Personne, bien évidemment. A part ça, le 8 Mars a encore le culot de prétendre qu’on pouvait se passer du Tribunal Spécial pour le Liban (TSL). C’est c’là oui ! A ce sujet, rappelons au passage, que si les cinq accusés de l'assassinat odieux de l’ancien Premier ministre libanais, Rafic Hariri, tous membres du Hezbollah (8 Mars), sont actuellement jugés en contumace par le TSL à La Haye, c'est grâce au 14 Mars. Par contre, si personne n'ose les arrêter pour les faire comparaitre devant le tribunal international, c'est à cause du 8 Mars, parce que le secrétaire générale de cette milice armée jusqu'aux dents, a eu l'arrogance de les élever au rang de "saints". Sur la liste des grands terroristes bien de chez nous, que personne n’ose encore juger comme pour certains islamistes, même par contumace, se trouvent aussi les Eid, father & son, les leaders alaouites libanais du 8 Mars. Ils sont impliqués dans un double attentat survenu devant les mosquées sunnites de Tripoli, à la sortie de la prière, il y a plus d’un an déjà, et qui a fait une cinquantaine de morts (août 2013). Les preuves sont accablantes au point de pousser le juge d'instruction de l'armée libanaise, là aussi, à requérir la peine de mort à l'encontre du rejeton. Ces grandes gueules se sont réfugiés chez leurs coreligionnaires syriens et se sont mis, comme par hasard, sous la protection du régime de Bachar el-Assad. Là également, on se pose la question, qui de la classe politique au Liban aujourd’hui, oserait laisser condamner et exécuter Ali et Rifaat Eid ?

Et question hypocrisie, les dirigeants du 8 Mars ne se gênent point. L’équation étant ce qu’elle est, ce camp s’offusque à l’idée même, que les autorités libanaises puissent négocier avec les ravisseurs, la libération de la trentaine de militaires libanais, contre 400 islamistes emprisonnés à Roumieh, et 5 millions de dollars, peut-être pour réinsérer les détenus, dans le djihad sans doute ! On pourrait les comprendre s’il ne s’agissait pas du 8 Mars et du Hezbollah spécialement. Aux amnésiques par conviction et par omission, il faut rappeler sans doute que l’histoire raconte qu’au petit matin du 12 juillet 2006, des miliciens du Hezbollah franchissent la frontière israélo-libanaise, sans aucune autorisation de qui que ce soit de la part de l’Etat libanais, attaque une patrouille israélienne, en territoire israélien, tue sur le champ huit soldats et kidnappe deux autres (ils étaient morts). L’opération « al wa3éd el sadeq » (promesse sincère) avait pour but dès l’origine, de négocier avec « l’ennemi israélien » la libération de trois miliciens libanais détenus en Israël, dont le célèbre Samir Kuntar, un membre du Front de Libération de la Palestine, condamné pour l’assassinat d’une fillette israélienne de 4 ans avec la crosse de son fusil lors d’une opération palestinienne dans l’Etat hébreux en 1979. La libération de Samir Kuntar a eu lieu après deux ans de négociations entre le Hezbollah et Israël. Elle a coûté au Liban une guerre de 34 jours, près de 1 500 morts, 10 000 blessés, 750 000 déplacés et plus de 10 milliards de dollars de dégâts matériels et de pertes économiques, soit l’équivalent de 50 % de notre PIB de l’époque (3 % du côté israélien). Oui mais, gare à toute négociation entre le Liban et l’Etat islamique pour libérer les militaires libanais !

Si la libération des islamistes libanais, et palestiniens résidant au Liban, pose un grave problème pour la sécurité nationale, qu’il ne faut pas sous-estimer dans le contexte régional actuel, il est clair qu’on ne pourra pas les renvoyer en Syrie, comme le souhaitent certains politiciens du 14 Mars. Il est clair aussi que la volonté du gouvernement libanais de Tammam Salam, constitué par une cohabitation entre le 8 Mars et le 14 Mars, exprimée il y a trois jours, sous la pression des leaders du 8 Mars, de continuer à détenir les islamistes de nationalité étrangère, notamment syriens, au Liban, n’est pas sans arrière-pensée. Cette obstination à ne pas vouloir déployer l’armée libanaise le long de la frontière syro-libanaise et à convaincre l’allié du camp du 8 Mars, Bachar el-Assad, de créer des camps de réfugiés syriens en territoire syrien, en sont les meilleurs preuves. Il est navrant de constater que la stratégie délibérée du 8 Mars consiste aujourd’hui, qu'on le veuille ou pas, à maintenir de facto cette « affection inflammatoire islamiste » au Liban et la libre-circulation transfrontalière des hommes et des armes, afin de donner une raison de plus et la possibilité aux djihadistes d’intervenir au Liban, justifiant du coup l’implication et surtout l’enlisement du Hezbollah libanais dans l'interminable guerre civile syrienne. Le problème, c’est que celle-ci peut durer encore de longues années !

Réf.
Contrôle de la frontière syro-libanaise et création de camps de réfugiés en territoire syrien, sinon, à la prochaine ! (Art.240) / Bakhos Baalbaki