Avec l’échec d’une énième phase de
négociations, qui devait conduire à la libération d’une certaine Joumana Hamid,
un nouveau militaire libanais a été
exécuté vendredi par une rafale de Kalachnikov dans la tête, par les
terroristes du Front al-Nosra. Ces derniers prétendent défendre « ahel al-sounna », les musulmans
sunnites au Liban comme en Syrie, dans la ville de Tripoli, à la prison de
Roumieh et par-delà les montagnes du Qalamoun. On sait que ces allégations sont
secondaires pour l’organisation syrienne. Non seulement tuer des détenus est
une violation grave de la Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de
guerre, mais les ignares devraient savoir qu’il est strictement interdit dans l’islam de tuer les captifs.
Leurs principaux objectifs au Liban sont
liés à l’intervention de la milice chiite du Hezbollah aux côtés du régime
alaouite de Bachar el-Assad et au maintien de leur emprise sur la ville sunnite
de Ersal. Indépendamment de la justesse de la première revendication de ce
groupe terroriste, à savoir le retrait de la milice chiite du Hezbollah de la
Syrie, cet acte n’en demeure pas moins pour autant, infâme et odieux. Certes, l’enlisement criminel du Hezbollah aux
côtés du dernier tyran de Damas dans la guerre civile syrienne, est révoltant.
Mais, rien, absolument rien, ne pourra justifier les actes terroristes d’al-Nosra
au Liban, les attentats-suicide et les exécutions sommaires, lâches et barbares,
de militaires libanais que l’organisation détient, encore moins la prise en
otage actuelle, de la ville libanaise de Ersal,
qui a eu la bonté d’héberger les leurs.
A propos de Ersal, depuis l’enlèvement
des militaires libanais par Jabhat
al-Nosra au milieu de l’été, et le groupe terroriste réclame la libération de Joumana Hamid. Dernièrement, le 28
novembre, l’organisation terroriste donna même 8 heures au gouvernement
libanais pour libérer leur chouchoute. En vain. Mais alors, pourquoi diable le
gouvernement obtus de Tammam Salam n’a pas répondu favorablement aux
barbus ? Est-ce par misogynie ? Ah, c’est un peu plus compliqué que cela. Joumana
Hamid est une libanaise sunnite de 32 ans, originaire
de Ersal, qui vivait jusqu’au déclenchement de la révolution syrienne de
divers trafics entre le Liban et la Syrie, comme celui des cuivres. On dit que
c’est une femme de caractère et qu’elle s’est faite une petite fortune, ce qui
lui a permis de goûter au luxe des nouvelles voitures. Après la mort de son
frère dans la guerre syrienne aux côtés des rebelles lors de combats avec le
Hezbollah, elle s’est radicalisée petit à petit, au point de se spécialiser dans l’import-export de
voitures piégées. Et alors qu’elle se trouvait au volant de l’une d’elle, et
s’apprêtait à la livrer à un kamikaze qui se croit en transit terrestre vers le Paradis, elle
sera arrêtée en février 2014 sur un barrage militaire dans la région de Ersal, grâce
aux services de renseignement de l’armée libanaise. Soupçonnée d’être impliquée dans plusieurs attentats terroristes qui
ont ensanglanté le Liban, elle risque la peine de mort. Et justement, il
parait qu’Abbas Ibrahim, le directeur général de la Sûreté générale, aurait
prévenu Jabhat al-Nosra, que si Ali Bazzal est assassiné, Joumana Hamid sera
exécutée par la Justice libanaise. Mais bon sang, dans quelle galère se trouve
notre pauvre Liban ! Dans ce sillage, rappelons que les autorités
libanaises ont récemment arrêté Soja Doulaïmi, l’ex-femme de l’usurpateur du califat, Abou Bakr el-Baghdadi, et l’épouse
du terroriste hybride Daech-Nosra, el-bandou2
Abou Ali el-Chichani. Eh bien, au moins sur le plan terroriste, les quotas féminins
sont respectés au Liban.
Le meurtre gratuit d’Ali Bazzal, un sergent des forces libanaises
de sécurité intérieure de confession chiite, par ces extrémistes sunnites
syriens -qui a entrainé en représailles, l’assassinat par des inconnus d’un
Libanais de confession sunnite- aussi triste soit-il, doit renforcer la détermination du gouvernement libanais de Tammam Salam sur deux plans :
d’une part, à lutter de pied ferme contre
le terrorisme du front syrienne d’al-Nosra au Liban, qui s’autorise à qualifier
l’armée libanaise de « milice » et à exécuter les soldats libanais innocents
comme des criminels dans une double violation des droits de l’homme et de l’islam,
et d’autre part, à contenir le
terrorisme du Hezbollah libanais en Syrie, qui combat la communauté sunnite
syrienne et nourrit par conséquent, la haine et la cruauté de l’organisation syrienne à
l’égard des militaires libanais rendus complices par la force des choses. Ce dernier point exige comme on le sait, le
déploiement de l’armée libanaise le long de la frontière syro-libanaise et sa
contrôle d’une main de fer, dans les deux sens. Pour l’instant, le
gouvernement libanais ne le fait que partiellement et dans un seul sens. La milice chiite continue sa
libre-circulation entre le Liban et la Syrie. Les dernières batailles de ce
weekend font état d’une douzaine de miliciens tués dans « l’accomplissement de leur devoir djihadiste », un
euphémisme pour éviter de dire à la communauté chiite libanaise, que ces jeunes
compatriotes sont morts en tentant de sauver la tyrannie des Assad et sur ordre
du Guide suprême de la République islamique d’Iran.
Il serait donc illusoire d’espérer mettre fin aux actes
terroristes des « djihadistes sunnites syriens » sur le territoire
libanais, tant que les « djihadistes chiites libanais » s’autorisent
des actes terroristes sur le territoire syrien. Baddo yekoun el wa7ad me3mé el alb, pour ne pas voir l’évidence
d’une telle équation. La tragédie d’Ali Bazzal, suivie de l’assassinat primitif
d’un jeune sunnite, nous apporte une nouvelle preuve que le Hezbollah est
responsable indirectement du sort des militaires libanais kidnappés par les
deux organisations terroristes syriennes, Daech et al-Nosra.
Pour ce qui de la lutte contre al-Nosra justement, il
y a beaucoup à dire. Sur ce point, on ne peut qu’être en colère, très en colère. Jabhat al-Nosra est un groupe djihadiste,
essentiellement syrien, même s’il intègre dans ses rangs beaucoup de djihadistes
étrangers. Il ne s’est imposé dans la
guerre civile syrienne qu’après les libérations par le dernier tyran des Assad
des islamistes emprisonnés par le régime alaouite lors de mascarades amnisties.
Assad junior est le digne héritier d’Assad senior ! Par son allégeance à l’organisation terroriste al-Qaeda,
le groupe est parfois désigné sous le sigle AQAL (al-Qaeda au Levant). Il
souhaite imposer à la société syrienne une charia
stricte, rejetant la démocratie qui serait « la
religion des impies ». Il a bénéficié des largesses de ressortissants
islamistes du Koweït et des Emirats. Il contrôle même certains puits de pétrole
actuellement.
Ses méthodes opératoires, qui
englobent notamment le recours aux attentats-suicide et aux exécutions
sommaires, ont poussé le Conseil de
sécurité de l’ONU et la plupart des pays occidentaux, Etats-Unis en tête,
et même la Turquie, à placer Jabhat
al-Nosra sur la liste des organisations terroristes. Le 11 juillet 2014,
son chef, al-Joulani, a annoncé ses intentions de créer un Emirat islamique au
Levant. Trois semaines plus tard, le 2
août 2014, en coordination avec l’autre organisation terroriste
« l’Etat islamique », al-Nosra
attaque lâchement et par surprise, des positions de l’armée libanaise et des
Forces de sécurité intérieure dans la Bekaa, entrainant la mort d’une
vingtaine de militaires libanais et le kidnapping d’une trentaine par les deux
organisations terroristes. A ce jour, deux
militaires libanais ont été exécutés par les terroristes de Daech (par
décapitation, le 30 août et le 6 septembre), et deux autres par Jabhat al-Nosra (par balles, le 19 septembre et le
5 décembre).
Et voici ce qui me rend fou de
rage. Comment se fait-il que le compte
Twitter d’al-Nosra « @JN_Qalamon », qui a revendiqué l’exécution du
militaire libanais, fonctionne encore au surlendemain de cet acte de barbarie, plus
de 36 heures après les faits ? Comment se fait-il que le rajout d’un simple
sous-tiret à « JNQalamon » ou le changement d’emplacement des lettres
« JN », permet à cette organisation terroriste d’avoir pignon sur les
réseaux sociaux de nouveau, comme si elle avait un casier criminel vierge et comme
si elle n’avait pas tué plusieurs militaires libanais auparavant et exécuté un soldat
libanais sommairement le 19 septembre, ce qui constitue un crime de guerre ? Comment
se fait-il que 20 jours après son ouverture, le 17 novembre, « @JN_Qalamon », le
nouveau compte de l’organisation terroriste de Jabhat al-Nosra fonctionne comme
si de rien n’était ? Comment se fait-il que le compte terroriste «
@JN_Qalamon » ait pu tweeter à 28 reprises, dont la menace de mort contre le policier
libanais, Ali Bazzal, le 28 novembre, et l’exécution proprement dite le 5 décembre,
sans s’en inquiéter pour autant ? Comment
se fait-il que tous les comptes islamistes de Jabhat el-Nosra fonctionnent et
sont connectés entre eux, sans la moindre difficulté : @JN_Qalamon,
@JN_Dimashq, @JN_Hama, @JnHoms, @JnHalab, @Idlib_JN, @Latakia_JN, @Deirzoor_Jn,
@JnDar3a_2, @S_H_MM ?
Certes, la traque des terroristes sur les réseaux
sociaux n’est pas une mince affaire. Ce qui est valable pour Twitter, l’est
aussi pour Facebook et YouTube bien entendu. Il suffit d’ajouter une lettre ou
un signe aux identifiants, pour créer de nouveaux comptes de propagande. Mais, dans
cette bataille, on oublie un détail capital. La fermeture d’un compte de réseaux sociaux, implique la perte de tous
les abonnés à ce compte. Eh oui, un compte de propagande tout seul, ne sert
à rien, c’est autant crier sa rage devant le miroir de sa salle de bain ou
pisser dans un violon. Il ne suffit pas d’en ouvrir un, il faut avoir des
réseaux de relais de la propagande. Tout môme ayant grandi dans la nature comme
moi le sait : une araignée met des jours avant de reconstruire la toile qu’on
a saccagée. Ceci étant, comment se
fait-il que le compte-mère de Jabhat al-Nosra, @S_H_MM, soit en activité
interrompue depuis le 28 août 2014, qu’il ait pu envoyer 1 369 tweets à ses
24 302 abonnés, sans la moindre inquiétude pour l’instant, alors que l’organisation
terroriste peut être poursuivie pour crimes de guerre pour l’exécution sommaire
des militaires libanais ? Compter sur l’hiver pour transformer les
terroristes d’al-Nosra et de Daech, reclus dans la haute montagne de l’Anti-Liban,
en stalagmites, est loin d’être une bonne stratégie pour libérer nos militaires
kidnappés et expulsés les intrus djihadistes du territoire libanais. Il est temps qu’une cellule spécialisée
libanaise traque plus efficacement ces terroristes sur le réseau Twitter.
Fermer les comptes des réseaux sociaux des organisations terroristes telles que
Daech / Etat islamique et Jabhat al-Nosra, fait partie de la guerre, qu’il faut mener en
collaboration avec les puissances arabes et occidentales, et gagner à tout prix. Le même raisonnement peut s'appliquer au régime alaouite de Bachar el-Assad et à la milice chiite du Hezbollah. Mais là, c'est une autre affaire et c'est beaucoup plus compliqué à réaliser.