lundi 31 décembre 2012

Droit de vote des expatriés et acquisition de la nationalité libanaise. Dernier avis (Art.96)


Ça paraissait comme une échéance lointaine. Eh bien voilà, nous y sommes. Mes cher(e)s compatriotes, spécialement vous qui résidez à l’étranger, sachez que le lundi 31 décembre 2012 était le dernier jour pour déposer une demande d’inscription sur les listes électorales libanaises pour pouvoir -ça ne coûte rien de rêver !- voter dans les ambassades de vos lieux de résidence aux prochaines élections législatives. Celles-ci devraient se dérouler au printemps 2013.

Vous devez savoir également que cette inscription n’est valable que pour les élections 2013 et que dans un tel cas, il ne sera plus possible pour vous de voter au Liban. Donc il fallait que vous soyez certains où vous vous trouverez la veille de l'été de l'année prochaine, au début du mois de juin a priori. « Mais bien sûr, pourquoi faciliter la vie du citoyen libanais quand on peut le cuire à petit feu ! » Plus grave encore, une telle inscription ne vous garantira même pas la possibilité de voter tant que les modalités de la mise en œuvre de ce vote n’ont pas été déterminées par le gouvernement libanais, notamment par le ministre des Affaires Etrangères, Adnan Mansour (membre du parti Amal de Nabih Berri). Or, il est navrant de constater que rien n’est fait pour aller vraiment dans ce sens. Pire, tout est fait pour perpétuer cette tare de la démocratie libanaise ad vitam aeternam, l’obligation archaïque pour un Libanais de se rendre au pays pour voter.


Le principe de vote des Libanais de l’étranger, un droit que le peuple libanais attend depuis la première Indépendance en 1943, a été affirmé par le président de la République, Michel Sleiman dès le début de son mandat. Il a été adopté par le Parlement libanais en 2008, Loi électorale n°25 du 8 octobre, après les combats de rue déclenchés par la milice du Hezbollah et ses acolytes à Beyrouth et dans la région du Mont-Liban. Ce vote aurait dû, et pu, avoir lieu en 2009 déjà, mais le ministre libanais des Affaires Etrangères de l'époque, Faouzi Salloukh, appartenant au 8 Mars (ministre chiite du Hezbollah), a prétendu que le délai dont il disposait, 8 mois !, ne lui permettait pas de le concrétiser. Hélas, le gouvernement Siniora n'a pas su ni le persuader à s'y mettre au travail, ni le contraindre à y parvenir à rendre ce vote effectif. Le bon sens aurait voulu que le ministère profite du nouveau délai de 4 ans pour peaufiner les modalités de mise en œuvre de ce vote, surtout que la loi l'y oblige. Eh bien que dalle, la mauvaise intention du tandem chiite est tenace. Et comment ! Le successeur de Salloukh, Ali el-Chami, le ministre chiite de Nabih Berri dans le gouvernement de Saad Hariri, prétend dès 2010 -c'est un prévoyant SVP, il s'y prend avec 3 ans d'avance même- dans un rapport qui se veut sérieux, qu'il est impossible d'organiser un tel vote, comme si l'Egypte, la Libye ou la Tunisie, serait réticente à nous donner conseil en la matière ! Le successeur du remplaçant du successeur, Adan Mansour, depuis qu'il est à son poste, suite au coup d'Etat démocratico-milicien du Hezbollah il y a 2 ans, reprend les mêmes arguments du même tandem avec la même mauvaise foi.

Les Libanais du pays et de l'étranger doivent savoir que le ministère des Affaires Etrangères de leur bien-aimé Liban est dans le giron du tandem chiite, Hezbollah-Berri depuis la seconde Indépendance en 2005 ! Tous les ministres des Affaires étrangères de ce tandem qui s'y sont succèdés depuis le retrait des troupes syriennes d'occupation, avancent non sans gêne le même argument pour justifier la privation des Libanais de l'étranger de ce droit légitime, pourtant inscrit dans la loi aujourd'hui: « Vous êtes mes chers compatriotes expatriés pas motivés par le droit de vote à l'étranger » ! Heureusement que le ridicule ne tue pas, pour qu'on puisse en rire. Niaiserie quand tu nous tiens ! Adnan Mansour, qui ne s'est décidé à sortir de sa torpeur provoquée que sous la pression du président de la République, Michel Sleiman, a eu le culot de sous-entendre il y a quelques mois, que la mise en œuvre de ce vote pourrait couter cher aux finances du gouvernement, lol, alors que les Libanais de l'étranger ne montrent pas un réel intérêt pour en bénéficier. C'est tout simplement ignoble ! Il oublie de préciser à ses compatriotes, que les expatriés savent très bien que non seulement cette inscription ne leur garantirait pas le droit de voter, mais que dans un tel cas, ils risquent d'être rayés des listes électorales au Liban et que dans tous les cas, à cause de l'esprit tordu de son camp politique, ils doivent décider dès aujourd'hui où ils voteront, au pays ou à l'étranger.

Quant au coût, je sais un simple « lol » ne suffira sans doute pas. De l'aveu même du ministre, l'opération coûterait seulement 2,4 millions de dollars au ministère ! « Wlak ya dellé chou hal hadr ! » Quand on pense au gaspillage de l'argent publique, on a vraiment envie de vomir sur de tels arguments. Un exemple parlant, malgré le gouffre financier de l'Electricité du Liban, et le fait que dans certaines régions libanaises 78 % de l'électricité distribuée est volée, le ministre de l'Ernegie, Gebran Bassil, n'a pas trouvé mieux que de décider d'importer des bateaux générateurs. Il y a une expression pour cela, c'est « jeter son argent par les fenêtres ». Un autre exemple éloquent, alors que notre dette abyssale dépasse les 135 % du PIB, les grassouillets de la Nation, nos chers ministres et députés, se sont auto-octroyés, sans aucune contestation interne audible,  une conséquente augmentation de leur salaire mensuel de 4,3 millions de LL en septembre, soit près de 2 867 $, avec un effet rétroactif de plusieurs mois, ya Allah, que nos politiciens sont consciencieux !, en quelques minutes de débats, ce qui porte leur salaire à près de 8 700 $/mois, alors qu'il a fallu 5 mois de négociations tendus pour augmenter les salaires de base des travailleurs de 200 000 LL, l'équivalent de 133 $, passant aujourd'hui à près de 450 $/mois. Economisez votre salive honnêtes citoyens, payeurs de taxes, de salaires de base et d'augmentations de vos représentants, ne crachez sur rien et sur personne, vos « tfeh » ne serviraient à rien, on vous dira qu'il pleut ! Les urnes sont toujours beaucoup plus efficaces. Tout ça c'est sans parler du gaspillage légendaire du Conseil du Sud, l'organisation étatique contrôlée par le parti de l'Estèz Nabih Berri, auquel appartient l'actuel ministre libanais des Affaires Etrangères. Et voilà encore un exemple tout frais de gaspillage de l'argent publique aussi grotesque que pitoyable. Avant de s'envoler pour Londres pour passer le réveillon en famille, le Premier ministre libanais Nagib Mikati, s'est entretenu avec son ministre des Affaires Etrangères, Adnan Mansour, tenez-vous bien, sur « l'ouverture de 35 consulats honoraires à l'étranger » (As-Safir 31 décembre 2012)! Eh bien, mes chers ami(e)s, haydé méchklit el ba7bou7a, on ne s'est plus quoi faire de l'excédent budgétaire. Trente-cinq consulats honoraires à travers le monde, c'est vraiment ce qui manque aux expatriés ? Pathétique. Ce n'est pas tout. Pour justifier ce projet risible, Monsieur le Ministre a le culot d'avancer l'argument que « C'est spécialement dans le but de faciliter l'inscription et le vote aux élections législatives présentes ou futures ». Expatriés, soyez fiers d'être de nationalité libanaise, votre gouvernement pense à vous même si vous êtes au fin fond de l'Arizona ou en Sibérie ! Laughing out loud. Et pour revenir à nos moutons, tout cela n'a pas empêché le ministre libanais de réclamer 10 millions de dollars à son employeur pour réussir l'opération électorale à l'étranger ! Je vous laisse comprendre la logique du mode de calcul du ministre de l'Estèz.

A l’heure actuelle, et parti comme c’est parti, les modalités de la mise en œuvre de ce vote ne verront jamais le jour avant les élections de 2013. Ne vous inquiétez pas, on y travaille dur comme fer pour cela, tout le monde met son grain de sel ! Comment ? Par omission ! Aucune campagne officielle, du gouvernement libanais, du ministère des Affaires Etrangères et des ambassades libanaises, ou non-officielle, des partis politiques libanais toutes tendances confondues, n’a été lancée pour inciter les expatriés à s’inscrire dans les représentations nationales à l'étranger, lieux inhospitaliers au rendement médiocre, appréciation perso je l'avoue mais qui n'a rien de caricatural soyez-en sûrs. Bilan des courses, des chiffres qui frôlent le ridicule, quelques milliers selon le ministre des Affaires Etrangères, une honte, si on tient compte de l’immigration massive des Libanais, estimée à un million d'électeurs potentiels selon les dires d'un ministre incompétent à la tête d'un ministère qui n'est même pas fichu de fournir un chiffre précis dans ce domaine alors qu'il est en poste depuis un an et demi et que ce ministère est entre les mains du tandem chiite Hezbollah-Berri depuis l'année 2004. Et le comble du ridicule, c'est que le titre officiel du locataire du palais Bustros, est « wazir el kharigiyé wal moughtaribine », ministre des Affaires Etrangères et des Expatriés. On rit jaune, un jaune hezbollahien. Il faut reconnaitre par ailleurs, que le boycott du gouvernement par le 14 Mars, la veille des élections, et ces revendications chimériques avancées, et leur obsession paralytique de la chute de Bachar el-Assad, ne facilitent pas les choses. Mais bon, disons el 3ein bassira woul id assira ! 

 
Pour être complet, sachez aussi que le gouvernement Mikati prévoit, dans ses projets de loi électorale, d'affecter 6 à 10 députés pour les Libanais de l'étranger ! En d'autres termes, les gouvernants du 8 Mars, non seulement ne sont pas chaud pour accorder ce droit à leurs compatriotes, mais en plus, ils ne voudraient surtout pas que ces derniers puissent voter pour les candidats de leurs lieux de naissance au Liban. C'est particulièrement abject ! Comme tous les prétextes bidon avancés depuis 69 ans pour justifier l’inacceptable, les gouvernants du 8 Mars, et jusqu’à preuve du contraire, Estéz Nabih et Walid Bek compris, craignent le vote de ces Libanais qui de par leur éloignement physique et psychique du bourbier libanais, étant à l'abri du lavage de cerveau des médias partisans de la métropole, ne sont pas soumis aux pressions politicienne, féodale, clanique et communautaire. 

Toujours est-il, le Premier ministre Nagib Mikati et tous les ministres de son gouvernement, notamment ceux du Hezbollah, de Michel Aoun, de Nabih Berri et de Walid Joumblatt, seront tenus responsables devant le peuple libanais, de la privation honteuse des Libanais de l’étranger, encore une fois, d’un droit démocratique élémentaire dont bénéficient tous les citoyens du monde. Par ailleurs, je blâme avec une grande sévérité le 14 Mars, de ne pas s’être préoccupé de la question, comme il se doit, au point de ne pas dormir la nuit, comme dans l'affaire des otages libanais en Syrie. Je me demande encore comment a-t-on pu accepter la niaiserie de l'accord Doha et la réélection de l’increvable Estéz à la tête du Parlement, sans imposer cette revendication légitime et surtout sans garantir sa mise en œuvre dès les élections législatives de juin 2009. Je reproche également aux médias libanais, de n’avoir évoqué que rarement le problème entre 2009 et 2013. Quelle que soit la loi électorale qui sera adoptée pour 2013 et par la suite, le vote des Libanais de l’étranger à toutes les élections nationales, ne doit plus dépendre du bon vouloir des minus de la politique libanaise.

Et puisqu’on parle des problèmes qui fâchent, la facilitation de l’acquisition de la nationalité libanaise par les descendants de Libanais, un autre droit méprisé que l’on réclame en vain depuis l’indépendance, doit désormais figurer dans les programmes électoraux des partis politiques libanais. Là aussi, pour des considérations communautaires, l’équilibre démographique entre chrétiens et musulmans -cette descendance estimée à 12 millions, serait à dominante chrétienne, un chiffre imprécis qui confond les Libanais et les descendants de Libanais- certains de la classe politique libanaise, voudraient zapper ce droit ad vitam aeternam. Jusqu’à quand pourront-ils le faire sans être sanctionnés par les Libanais de la Mère-Patrie ?


On se demande si le vote des expatriés aux élections de 2013 ne serait-il pas ce vœu pieux, la énième et vaine étape dans la quête du Graal par les Libanais de l'étranger ! Nous n’allons pas tarder à le savoir. En attendant, tous mes vœux pour 2013 ! Je souhaite en particulier le « droit de vote » aux Libanais de l'étranger, la « nationalité libanaise » aux 12 millions lointains cousins descendants de Libanais, « santé et prospérité » à toutes et à tous, au Liban, sur Facebook et à travers le monde. 


[Revu et complété le 2 janvier 2013]

mercredi 12 décembre 2012

Le Liban : de l'alphabet phénicien à la démocratie mafieuse ! (Art.92)


Funérailles à Beyrouth du général Wissam el-Hassan,
chef des Services de renseignement des Forces de
sécurité intérieure, assassiné le 19 octobre 2012.
L’histoire écrira que sur les côtes du Liban a été inventé outre l'alphabet phénicien, le concept de la démocratie mafieuse ! Certes, il y a eu des assassinats politiques dans tous les pays et à toutes les époques, dans les meilleures démocraties comme dans les pires dictatures. Mais jamais dans une démocratie, surtout en « temps de paix », le recours à ce moyen mafieux, n’a été si perfectionné, si méthodique, si systématique, si efficace, si étalé dans le temps et se développant dans une totale impunité. Au moins pour l'instant, en attendant le printemps et l'ouverture du procès des quatre membres du Hezbollah poursuivis pour l'assassinat le 14 février 2005 de  l'ancien Premier ministre du Liban, Rafic Hariri.

Les « forces obscures » dans notre pays, mais bien connues de tous!, ont adopté cette politique mafieuse depuis novembre 2004 : tout « potentiel » gênant doit être éliminé au Liban. Ils ont réussi souvent, ils ont échoué parfois (*). Ils retardent l’échéance, mais ils ne triomphent pas vraiment.

Rafic Hariri
(Premier ministre, leader politique, sunnite, "14 Mars"), Samir Kassir, May Chidiac* et Gebrane Tuéni (journalistes, chrétiens, 14 Mars), Pierre Gemayel (député, ministre, leader politique, chrétien, 14 Mars), Marwan Hamadé*, Walid Eido et Antoine Ghanem (députés; druze, sunnite et chrétien; 14 Mars), François el-Hajj (général de l’armée libanaise, chrétien), Saad Hariri* (Premier ministre, leader politique, sunnite, 14 Mars), Samy Gemayel* (député, leader politique, chrétien, 14 Mars), Samir Geagea* (leader politique, chrétien, 14 Mars), Boutros Harb* (député, chrétien, 14 Mars), Wissam Eid et Wissam el-Hassan (Renseignements des FSI, sunnites, "14 Mars").

Pourquoi préciser la religion et l'appartenance politique ? Parce que je ne suis pas né de la dernière pluie et je ne suis pas adepte de la politique autruchienne ! Et si cela n'a strictement aucune importance aux yeux de certains, alors il faut bien avouer que question probabilité, il y aurait des coïncidences dans la vie politique libanaise qui laissent perplexe. Voilà la triste réalité au pays du Cèdre.


En énumérant cette liste récente, on ne peut ne pas avoir une pensée à tous ceux qui ont été assassinés « en temps de guerre » pour des raisons politiques, dont deux présidents de la République, Bachir Gemayel (14 septembre 1982) et René Mouawad (22 novembre 1989), déjà dans une totale impunité, pire, dans une certaine liesse chez les adversaires. Disons-le clairement : la Tyrannie des Assad, père et fils, est suspecte, jusqu’à la preuve du contraire, de tous les assassinats politiques commis au Liban depuis 1976. C’est une constance. La variable étant les complicités et les exécuteurs.


Tant que la justice n’est pas rendue, rien ne changera. Et tant qu’il n’existe pas d’unanimité populaire, dans les 17 communautés libanaises, bien avant l'unanimité politicienne, pour dénoncer sans ambages le recours odieux à l’élimination physique de l’adversaire, au lieu de se perdre et vouloir nous perdre dans les palabres, les théories du complot et les hypothèses les plus abracadabrantesques, le Liban demeurera dans cette démocratie mafieuse, sa réputation restera ternie par cette pratique infâme et le prestige d'être les descendants des inventeurs de l'alphabet simplifié ne nous sera plus d'aucun secours !

dimanche 9 décembre 2012

Akhbar fuck yourself ! L'affaire Okab Sakr : Adobe au service de la mythologie du 8 Mars (Art.91)


Et voilà, j’ai bien fini par trouver 150 minutes pour écouter les enregistrements compromettants sur Okab Sakr diffusés par Akhbar-OTV, lire les trois articles d'al-Akhbar sur le sujet et visionner la conférence de presse tenue par le député libanais devant la Sublime Porte de la merveilleuse ville d’Istanbul. Ouf ! Et certains se demandent encore pourquoi on n’avance pas dans ce pays. Palabres, ché3r, littérature, tézrik, complots, tézwir, falsifications, ékél khara, mensonges, sea, sex and sun, tout a sa place au pays du hommos, à l’exception, entre autres, du bon sens et de l’intérêt national ! Allez savoir pourquoi, les éléments nécessaires pour faire du Liban un pays digne de ce nom, manquent toujours et cruellement dans notre contrée, chez certains compatriotes, à cause de certains compatriotes. Ne me demandez pas non plus, pourquoi bien avant les clarifications apportées par Okab Sakr, je sentais que l’affaire en question n’était qu’une supercherie à 5 piastres, syriennes de surcroît, assadiennes précisément, une monnaie qui n'aura plus cours prochainement, bientôt, bien tard, qu'importe. Le curriculum vitae peu reluisant de ce journal bas de gamme et la mauvaise foi de cette chaine partisane ? Sans doute ! J’avais déjà conclu mon article du 2 décembre « Koker fuck yourself ! Photoshop au service de la mythologie iranienne » avec ironie et sarcasme : « Une dernière chose, ne craignez plus rien, ce qui relevait des phénomènes inexpliqués autrefois, Photoshop et les apparentés de la grande famille Adobe peuvent très bien les expliquer de nos jours. Enfin, presque ! Ah, vous pensez à Okab Sakr sans doute, un député de la nation perdu de vue depuis plusieurs années et retrouvé il y a trois jours dans le roman-sonore du quotidien libanais al-Akhbar dans le rôle de standardiste chez Hariri’s Weapons Manufacturing Company, pour prendre les commandes d’armement des rebelles syriens ? « Wlak ya Bakhos, on a convenu d’un petit article, le truc qui fait sourire un dimanche matin, pour accompagner un double expresso wou bass! » Tayeb bassita. Yalla, à la prochaine. »

Je ne pensais pas que la prochaine fois serait si proche. Ce matin, un double expresso ne suffira sans doute pas ! A ce rythme, je vais devoir me consacrer à plein temps au Liban et facturer mes articles au gouvernement libanais pour service rendu à la nation ! Doublez le double et allons-y. Un journal partisan jusqu’à la dernière lettre de la dernière colonne de la dernière page, jusqu’au dernier numéro de sa parution, publie le 29 novembre, la transcription de plusieurs conversations téléphoniques qui auraient eu lieu entre le député Okab Sakr et des rebelles syriens. L’affaire Okab Sakr est née. Quelques heures plus tard, une chaine de télévision, à la couleur politique éclatante, OTV, celle du Courant Patriotique Libre, décide de passer les enregistrements dans son journal de 20h. L’affaire Okab Sakr prend de l’ampleur.

SAKR GATE. Passons d’abord sur les commentaires grotesques des médias syriens et de leurs pendants libanais, Akhbar-OTV, sur « les preuves de l’implication d’Okab Skar dans le jeu des armes et de sang en Syrie... le député de la nation serait noyé dans le jeu de sang jusqu'au cou ». C’est c’là oui, et pourquoi ne pas nommer le premier et le dernier tyran des Assad au prix Nobel de la Paix pour l’ensemble des œuvres de la famille Assad réalisées au Liban comme en Syrie ! Minable. Passons ensuite sur le fait que le retard dans la réponse du député libanais aux révélations d’al-Akhbar, ne se justifie que par le temps nécessaire aux techniciens okabiens pour retravailler et falsifier les « enregistrements d’al-Akhbar », déjà douteux, toujours dans l’esprit « Adobe mon amour, comme tu peux rendre bien des services sans distinction de race et de couleur politique ! » Pathétique. C'est vrai qu'Okab Sakr a attendu une semaine pour tenir sa conférence de presse (6 décembre) et pour répondre en détail à ses détracteurs, mais il faut bien rappeler, que les révélations d'Akhbar-OTV se sont étalées sur trois jours, c'est-à-dire, jusqu'au samedi soir 1er novembre, et que rien n'indiquer que le lundi 3 ou mardi 4, il n'y aurait pas d'autres « révélations »! Passons enfin sur la stratégie de la ruse que le jeune député libanais aurait soi-disant employée pour piéger ses adversaires ! Il aurait glissé par exemple « on nous a pris la main dans le sac », pour prouver la stupidité de ses adversaires, il aurait contacté lui-même des amis de la New TV et de la Futur TV, afin de voir si al-Akhbar possédait d’autres révélations, pour mieux les piéger et mieux les ridiculiser ultérieurement et d'autres déclarations par-ci par-là. Très cher Okab, nous aurions pu être amis pour 36 raisons, bass ma3lé, ne le prend pas mal, il n’y a rien de personnel, ce n’est pas une bonne stratégie, surtout sur le plan électoral, notamment après deux ans de black-out médiatique !

LE PITCH. L'affaire Okab Sakr serait la preuve par le son que Saad Hariri, l’ancien Premier ministre libanais, fournit des armes aux rebelles syriens. Au cours de la « Sakr Gate », qui a tout l’air d’une vaste offensive médiatique menée tambour battant par certains médias syriens et libanais, 8 Mars et apparentés, Akhbar-OTV-NewTV-TéléArabeSyrienne-Akhbariya-Dounnia-Sana, on apprend entre autres, qu’un prétendu chef rebelle syrien, du nom d’Abou al-Naamann, a réclamé des armes au député libanais, qui aurait accepté de lui en fournir. Il y a eu d’autres allégations qui seront abordées plus loin. De l’autre côté du Bosphore, au cours d’une conférence de presse tenue le 6 décembre par le principal concerné, on apprend que l’échange a bel et bien eu lieu et qu’il provient de séquences enregistrées sur son ordinateur personnel (500 minutes au total) et volées dans des conditions que le député libanais n’a pas souhaité détailler (où, quand et comment). Ces échanges se sont déroulés il y a 7 mois alors qu’une dizaine de pèlerins libanais (qui feraient partie du Hezbollah ?), étaient pris en otage par des groupuscules rebelles en Syrie. Un détails que les pros d'al-Akhbar et OTV n'ont pas jugé utile d'en parler ! Toujours est-il, en signe de bonne volonté à l’égard de la milice chiite, et parce qu’il est en bons termes avec les rebelles sunnites, Saad Hariri, le sunnite, s’était proposé d’intervenir pour aider à la libération des otages chiites. Une équation aux nombreux paramètres communautaires ? Eh oui, bienvenue au Moyen-Orient.

LES ENREGISTREMENTS. Le 1er échange téléphonique est tendu par moment, il oscille entre le dialogue de sourds et le vaudeville. D’emblée, le député libanais convient avec son « obscur » interlocuteur -ne pas perdre d’esprit  que rien ne prouvait que ce prétendu Abou el-Naamann était un rebelle et qu’il détenait les otages libanais !- que les ravisseurs enverraient des preuves que les otages seraient vivants et en bonne santé (le syrien propose « une vidéo avec les otages portant le journal du jour », un amateur de films américains le Naamann !). Assez rapidement, celui qui se présente comme étant le porte-parole des trois groupuscules armés qui détiennent les otages, réclame effectivement des armes. D’abord implicitement. « On n’a pas d’autres demandes que du fer ! ». Il y revient à plusieurs reprises. Devant l’incompréhension manifestée par le député, le rebelle devient plus explicite. « Nous voulons un peu d’armes pour résister et en finir avec ce fils de chien qui a détruit nos maisons ». Okab Sakr lui fait savoir qu’il ne peut pas y répondre favorablement. Imperturbable, Abou el-Naamann fixe alors la base du deal, « Si tu me procures du fer, je livrerai ton groupe ». Le libanais lui précise que tout ce qu’il lui était possible de faire c’est de lui « apporter un soutien au niveau international, une assistance humanitaire, médicale et financière, assurer la reconstruction éventuellement, mais des armes je ne peux pas ». Abou el-Naamann essaye un autre moyen, en titillant la fierté du député libanais : « Enno ma féhmna, walao, Okab Sakr avec ses relations internationales, des contacts avec cheikh Saad, avec Qatar et l’Arabie saoudite, et vous n’êtes pas capable de nous procurer quelques pièces d’armes ? » Et si c'était un piège ? Devant l’opposition du député, il est d’une grande fermeté : « Tout est une question de fer ! Donnant donnant. A part ça, rien. »

A la demande d’Okab Sakr, il finit par énumérer ses besoins de « fer » (300 RPG, 250 000 cartouches, etc.). Il sera même convenu de la procédure à suivre pour la livraison des armes (où, comment, qui sera présent, etc.). Relisez la dernière phrase et notez bien ce détail. Accablant diront les inquisiteurs ! Il a été présenté par al-Akhbar et OTV comme la preuve absolue qui condamne sans appel le tandem Okab Sakr / Saad Hariri. On allume le bûcher ? Mollo les zozos ! La malhonnêteté du journal d'Ibrahim el-Amine et de la chaine de Michel Aoun, leur a fait oublier que lors de ces négociations pour libérer les otages libanais, non seulement qu’il fallait s’assurer de l’identité réelle de tous ces prétendus ravisseurs qui frappaient à la porte du richissime Saad Hariri afin d’écarter les fripouilles-profiteurs en tous genres, les faux-rebelles et les vrais-chabiha, Abou el-Naamann n’était pas le seul prétendu ravisseur, mais en plus, il a été convenu entre Sakr et le commandement central des rebelles syriens de localiser les groupuscules armés, afin que l’Armée Syrienne Libre (ASL) procède à une opération commandos pour les libérer ! Et pour les localiser, il fallait évidement rentrer dans le jeu. Mais ça c’est un détail de l’histoire qu'al-Akhbar et OTV n’ont pas jugé utile de communiquer à leurs lecteurs-téléspectateurs parce qu’il n’arrangeait pas leurs affaires. Au passage, je voudrais rappeler aux jeunes rédacteurs et techniciens du journal et de la chaine, un événement qu’ils auraient dû étudier au cours de leur cursus universitaire, celui où Michel Aoun s’est présenté sur al-Manar, la chaine du Hezbollah, pour exposer une photo prise lors des émeutes aounistes du 23 janvier 2007, d’un milicien qui serait du parti des Forces libanaises, brandissant un fusil en direction d’un groupe de soldats de l’armée libanaise. Il s’est avéré plus tard, que la photo Aoun-Manar était falsifiée, l’homme en question étant un milicien du Hezbollah rajouté par les faussaires, avec l'ancienne croix des FL sur son T-shirt, pour impliquer le parti de Samir Geagea ! A propos, je regrette le défoulement d’Okab Sakr sur Michel Aoun, « cheikh el-kézzébine », accusé d’être à l’origine des falsifications, alors qu’il a pris toutes les précautions pour éviter de heurter la sensibilité du chef du Hezbollah: « Toute cette campagne porte atteinte à Hassan Nasrallah et entamerait sa crédibilité ! » Okab Sakr devait savoir que la gentillesse et les amabilités en politique ne mènent nulle part.

Dans un 2e enregistrement version Akhbar-OTV avec un dénommé Abou-Rachad, le prétendu responsable des approvisionnemnts en armes à Hama, il est question « d’augmenter les quantités livrées ». Dans la version Okab Sakr, il s’agit de lait, de couvertures et de tentes, envoyés à la population syrienne par Saad Hariri et Bandar Ben Sultan ! Plus loin dans une séquence tragi-comique, on détaille même les demandes, des fusils-mitrailleurs et 40 000 balles pour libérer 4 otages, soit 10 000 balles par otage ! Le plus grotesque de tous, c’est l’attribution d’une voix à Saad Hariri par Akhbar-OTV, expertisée par Jamil el-Sayyed himself, lol !, avec un petit doute quand même de certains experts anonymes bien entendu, faut bien faire sérieux !, qui s’est avérée être sans l’ombre d’un doute celle de l’un des porte-paroles de l’ASL, en tout cas ressemblant à la voix de tout le monde sauf à celle de Saad Hariri ! En réalité, dans cet enregistrement Okab Sakr exposait à l’ASL la demande de rançon inacceptable de ces groupuscules rebelles contre la libération des otages. Les falsificateurs, l’ont transformé en « Okab Sakr exposant la commande d’armement à Saad Hariri pour alimenter la guerre contre le régime syrien ».

Le 3e enregistrement est présenté comme étant aussi accablant que le premier, alors qu’il est après un examen attentif le plus ridicule.
Et pour mieux vous en rendre compte, je vais vous le détailler. Il est question d'un échange téléphonique secondaire dans l'échange téléphonique principal ! Okab Sakr appelle un certain Louay Almokdad, mais très rapidement après les « Allô » habituels, le député libanais met le porte-parole de l’ASL en attente, a priori sur Skype, pour conduire une conversation téléphonique via un téléphone cellulaire probablement, avec un « Monsieur X ». Dans cette conversation secondaire le député libanais est parfaitement audible mais pas son interlocuteur, et par un montage malin, les faussaires laissent celui qui écoute cet enregistrement conclure, qu’il s’agissait sans l’ombre d’un doute de Saad Hariri à l’autre bout de la ligne. Le député libanais, dit à Monsieur X : « Ça va se résoudre, on suit l’affaire. Je sais que tu n’as pas dormi, moi non plus. Non, ça va se régler inchallah, c’est sûr. Je te mets au courant. » Il raccroche et reprend la conversation avec le syrien. Louay Almokdad demande alors : « C’était qui, cheikh Saad ? », Okab Sakr lui répond : « Le président Hariri est affolé, il veut en finir par tout moyen, il faut que ça soit réglée. » La suite, il est question de « munition à moyen portée ». Louay interroge le manitou d’Istanbul : « La moindre des choses, as-tu mis cheikh Saad au courant ? » Okab Sakr : « Oui je l’ai mis au courant, crois-moi il ne dort pas, il suit l’affaire seconde par seconde, il veut qu’elle soit réglée par tout moyen, il me l’a dit précisément qu’il faut que ça soit réglée, il n’y a aucune place à l’échec. » Le syrien de l’ASL interrompe le député libanais : « Okab, il y a un problème. Ce qui les inquiète mon frère c’est que la région peut tomber, et si la région tombe, toutes les régions avoisinantes tomberont comme un domino. Pigé ? » Okab Sakr lui répond : « J’ai bien compris. Mais je te dis j’ai parlé avec le Premier ministre, qui dit qu’il faut que nous la réglons. Nous ne sommes pas rentrés dans les détails, nous ne le voulons pas. Nous avons une cause que nous voulons régler, qu’on en finisse et que ça se termine. » Dans la version « Okab Sakr », le règlement concerne l’affaire des otages chiites, tout simplement, et que même si Saad Hariri accepterait de verser de l’argent, cet argent n’est qu’une rançon pour la libération des otages, il n’est nullement question de munitions et de bataille !

Et après les enregistrements falsifiés, c’était le tour des « enregistrements imaginaires » ! Jamil el-Sayyed, cet ancien responsable sécuritaire chiite durant la période de terreur syrienne au Liban (1990-2005), prétend que les médias du 8 Mars, sont en possession d’autres enregistrements où il est question que « les concernés fourniraient aux rebelles syriens des missiles sol-air, et que les fournisseurs libanais les ont prévenu que chaque missile devrait abattre un avion du régime sinon, ils n’auront pas un autre pour le remplacer ». Mais dans un élan miséricordieux, le front syro-libanais contre Saad Hariri n’a pas jugé utile de le diffuser... à moins qu'il ne soit en cours de montage !

PLACE A LA FICTION LITTERAIRE. Et après les enregistrements imaginaires, place à la fiction littéraire. Il faut savoir que toutes ces « révélations » n’auraient jamais vu le jour, sans un homme, qu’il convient d’appeler « Monsieur Mystère Akhbar-OTV » ou pour faire simple, disons Monsieur MAO. La source du journal al-Akhbar et de la chaine OTV serait un proche collaborateur du député libanais, qui « travaillait dans un des trois Centres des Opérations créés en Turquie pour soutenir la Révolution syrienne et dirigés par une vingtaine de syriens et de libanais ». Monsieur MAO a décidé de révéler l’affaire car « Abou el-Sakr, nom de guerre du député auprès des rebelles, aurait ruiné la révolution par ses actions folles et hystériques. » Aujourd’hui, il craint pour sa sécurité car « il est actuellement recherché par Okab Sakr. »

Monsieur MAO raconte avec moult détails tout ce qu’il a sur le cœur. Et dans les détails il est intarissable. Des histoires d’Abou el-Fadal, Abou el-Nour, Abou el-Bara2 et Abou el-Sakr comme naguère, celles d’Abou 3ammar et Abou Ayad ou comme celles d’Abou Zouz et Abou André ! On apprend de Monsieur MAO, « qu’un Centre des Opérations syro-libanais fut créé à Achrafieh en 2011, qu’un autre fut installé dans le Nord du Liban, tous deux reliés aux centres turques, et qu’une villa de Faqra servirait de point de chute pour les responsables syriens de l’opposition qui sont de passage au Liban et pour distribuer l’argent aux rebelles. » Marquons une pause pour faire un jeu ! Question pour un champion: alors, de quelle villa à Faqra s’agit-il ? La première personne qui devine et qui arrive à la villa en question, avec une copie du présent article, gagnera 1000$, avec une kalachnikov et 250 balles russes! Allez, la pause est finie. On apprend aussi par Monsieur MAO « qu’Okab Sakr est l’homme de confiance du Qatar, de l’Arabie saoudite et de la Turquie ; que non seulement il arme les rebelles mais qu’il veille aussi sur le bon déroulement des opérations militaires en Syrie, il les conduirait même ! » Okab Sakr mérite bien son surnom, le manitou d'Istanbul, hein ?

On apprend également de Monsieur MAO, « que le député libanais déteste le régime d'Assad mais n’aime pas le peuple syrien ; qu’il veut envoyer des armes partout, se souciant peu de la vie des gens ; qu’il est impliqué dans certains attentats contre des civils syriens ; qu’il a envoyé, plus d’une fois, des gens à la mort, parce qu’il doutait d’eux ou pour des différends personnels ; qu’il s'est vengé de certains combattants, avec qui il avait des différends, en les plaçant sur les premières lignes de front ; qu’il a même retardé l’arrivée des secours de 3h pour évacuer un rebelle blessé avec qui il avait eu un problème ! » On apprend par ailleurs, « qu’il existe des relations étroites entre Okab Sakr et le kidnappeur des pèlerins libanais, un dénommé Abou Ibrahim -encore un Abou, les Abou font toujours sérieux dans ce genre de récit!- qui reçoit 50 000 $/mois du député libanais ; que ce dernier distribue de l’argent sans aucune distinction entre les assassins, les mercenaires et les opposants ; qu’il a refusé à plusieurs reprises d’octroyer des aides financières aux blessés et aux réfugiés sous prétexte que ces derniers n’avaient qu’à s’adresser aux organisations humanitaires ; et enfin, que le général Wissam el-Hassan est intervenu à plusieurs reprises pour libérer des syriens impliqués dans le trafic d’armes. »

Waouh me diriez-vous ! Et tout cela sans AUCUNE PREUVE à l’appui évidemment, même falsifiée. Allez, un conseil gratos de Bakhos Baalbaki himself aux écrivains d’al-Akhbar et d’OTV : il faut toujours veiller à ce que la fiction reste toujours plausible, sinon le lecteur-électeur n’accroche pas ! Yalla, bassita, la prochaine fois.

CONCLUSION. L’affaire Okab Sakr est close, jusqu’à nouvel ordre. Une plainte judiciaire est en cours au Liban, on en saura plus un jour. En attendant, tout semble indiquer que Sakr gate n’est qu’une offensive grotesque syro-libanaise de faire croire que Saad Hariri arme les rebelles syriens. Donc, il ne fait aucun doute que les révélations d’al-Akhbar et d'OTV sont un un coup monté de toutes pièces. Et comment ! Selon le député libanais, il y a quelques semaines, Wafic Safa, le responsable de la sécurité de la milice du Hezbollah, a contacté le nouveau chef des Renseignements libanais, le général Ossam, pour l'informer qu’« on » était en possession d’enregistrements compromettants contre Saad Hariri et Okab Sakr, et qu’on aimerait en parler pour éviter la discorde. Louche ! Flash-back. Début d'automne 2012, comme par hasard, le nom d'Okab Sakr commençait à apparaitre dans la presse internationale (The Guardian, Time), étant le manitou d'Istanbul. Même source, même fuite ! Bon, il est possible que le député de Zahlé n’a pas dit la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Tous ces cafouillages camouflés en ruses, le confirment. Cependant, si les enregistrements parlent d'armes, ils n'apportent aucune preuve que des livraisons ont bien eu lieu ! Un détail qui n'a pas échappé aux faussaires. Alors, pour combler cette lacune les littéraires d'al-Akhbar et d'OTV, ont brodé autour de ces enregistrements -somme toute mineurs quant à l'importance de leur contenu, même falsifié- des histoires mythologiques sur Saad Hariri, Okab Sakr et la Révolution syrienne. Il faut dire qu'Adobe rend bien des services mais ne fait pas tout quand même !

Toujours est-il, cette offensive syro-libanaise contre Saad Hariri a pour nom de code « ERASE ALL »! Elle est destinée, par le biais de la confusion et de la diversion, à faire oublier aux libanais un ensemble d’éléments. J’en vois dix.

1. Faire oublier que Bachar el-Assad est un tyran qui massacre son peuple depuis 20 mois, avec ou sans les salafistes, indépendamment du fait que les Syriens portent des drapeaux blancs (au début de la Révolution) ou des armes à la main (aujourd’hui). Il est responsable de la destruction de son pays et de la mort de 40 000 personnes pour l’instant. Il sera poursuivi, tôt ou tard, à la fois par le peuple syrien, par une instance internationale et par l’Histoire, de son vivant ou à titre post-mortem, pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre.

2. Faire oublier l’implication sérieuse de la milice chiite libanaise du Hezbollah en Syrie, attestée par le cortège de « martyrs », au côté du régime alaouite des Assad pour écraser les rebelles sunnites de l’Armée syrienne libre. C’est tout ce que retiendra l’histoire, et rien d’autre.

3. Faire oublier l’arrestation de Michel Samaha par les Services de renseignement libanais des Forces de sécurité intérieure (FSI). Cet ancien ministre libanais du 8 Mars, un « livreur de colis piégés », projetait à la demande personnelle de Bachar el-Assad, assassiner un certain nombre de personnalités libanaises, dont le patriarche maronite Bechara Rai, et mettre cela sur le dos des salafistes, pour créer une discorde islamo-chrétienne au Liban. Cette offensive intervient la veille de la publication de l’acte d’accusation le concernant.

4. Faire oublier que Jamil el-Sayyed est le « deuxième homme » dans la voiture de Michel Samaha, qui transportait les explosifs envoyés par Bachar el-Assad personnellement, d’après les aveux de l’ancien ministre, pour faire « exploser » le Liban (« heik baddo Bachar... c'est ce que veut Bachar »).

5. Faire oublier les questions soulevées après l’assassinat du général Wissam el-Hassan, chef des Renseignements des FSI en plein cœur de Beyrouth, à savoir qui contrôle l’aéroport de Beyrouth et les télécommunications au Liban.

6. Faire oublier que le gouvernement Mikati est supposé arrêter les 4 membres du Hezbollah poursuivis par le Tribunal Spécial pour le Liban, pour l’assassinat de l’ancien Premier ministre du Liban, Rafic Hariri, et l’ouverture imminente du procès le 23 mars 2012.

7. Faire oublier la concorde nationale au Liban en déclenchant une discorde entre les sunnites d’une part et les chiites et les alaouites d’autre part, pour « soulager » le régime syrien. Le scénario satanique initial était le suivant : faire croire d’une part, que Saad Hariri, un leader sunnite, a fait kidnapper les otages libanais chiites par les rebelles sunnites (hypothèse relayée dans la presse syro-libanaise du 8 Mars et par les « ulémas », une instance sunnite-chiite, sous l’influence du Hezbollah !); et faire croire d’autre part, qu’Okab Sakr, le député chiite, a fait envoyer des Tripolitains sunnites se faire massacrer par les Syriens alaouites (14 Libanais sunnites de Tripoli venant combattre aux côtés des rebelles syriens, ont été tués par l’armée syrienne à Tell Kalakh en Syrie le 30 novembre). Et comme conséquences prévisibles, ce fut l’embrasement de Tripoli (les accrochages entre sunnites, anti-régime syrien, et alaouites, pro-régime syrien, ont fait plus d’une dizaine de morts pour l’instant). La situation est explosive. Place à la discorde, bienvenue au Liban !

8. Faire oublier la revendication légitime du 14 Mars pour la démission du gouvernement Mikati après l’énième assassinat visant ce camp, alors que les suspects sont toujours les mêmes !

9. Faire oublier que l’éloignement de Saad Hariri et d’Okab Sakr de leur pays, n’est ni pour des motifs touristiques ni pour soutenir les rebelles syriens, mais uniquement pour des raisons de sécurité. Après les projets d'assassinat de Saad Hariri et de Samy Gemayel, les tentatives d’assassinat de Samir Geagea et de Boutros Harb, et l’assassinat du général Wissam el-Hassan, il ne fait pas bon de vivre au Liban pour les personnalités du 14 Mars.

10. Neuf objectifs dans un seul but : compromettre le retour politique de Saad Hariri la veille des élections législatives du printemps 2013 et surtout de griller l'avenir politique d'Okab Sakr, ou au moins le ternir, la principale personnalité chiite libanaise opposant farouche à la milice chiite du Hezbollah ! A défaut de l'assassiner physiquement, on voudrait l'assassiner politiquement. C'est ignoble.

Je suis sidéré par le comportement des faussaires-fossoyeurs-transfrontaliers-syro-libanais et de certains médias sans scrupule, sans vergogne et sans déontologie du 8 Mars, fermant les yeux sur des violations graves de la souveraineté libanaise par le régime syrien et par le Hezbollah, trouvant des contournements infâmes aux assassinats odieux qui frappent le 14 Mars depuis sept ans, et dépensant une énergie folle pour falsifier des faits, au lieu de faire leur boulot honnêtement et d’œuvrer avec patriotisme dans l’intérêt de leurs pays respectifs et de leurs compatriotes !